Jean-Philippe Chauvin

D’Orléans à Reims ?

Pour les croyants, certains événements particuliers sont des signes quand les autres, politiques d’abord, y voient plutôt, selon le beau mot de Léon Daudet, des intersignes. Un fidèle de la Maison de France, dont la foi catholique est fervente quand sa passion politique ne l’est pas moins, nous a envoyé ce témoignage d’un récent voyage princier à Orléans. Au-delà des querelles dynastiques qui, trop souvent, amoindrissent la crédibilité du propos monarchiste, il nous a semblé intéressant de reprendre de larges extraits de son texte inspiré par une ferveur royaliste toute bernanosienne.

« Orléans – 8 mai 2021 – Sainte Jeanne d’Arc veille sur la Maison de France,

Après la très sainte Messe célébrée ce 8 mai en la cathédrale Sainte Croix d’Orléans, comment ne pas remercier la Sainte de la Patrie pour la sollicitude toute particulière qu’elle manifeste envers la Maison de Bourbon-Orléans ?

Comment ne pas être touché par sa tendresse, si l’on se rappelle le sentiment de paix et de concorde familiale qui régnait lors des funérailles de Son Altesse Royale le Prince François de France célébrée le 6 janvier 2018, en la fête de l’Epiphanie. Ce jour étant le 606ème anniversaire de la Sainte de la Patrie.

Plus tôt dans le temps, Son Altesse Royale, feu le Comte de Paris (1933-2019) avait eu le grand courage de demander pardon pour le vote régicide de son aïeul Philippe Egalité, à l’occasion d’une Messe du 21 janvier célébrée en l’Eglise Saint Germain l’Auxerrois en la mémoire du Roi Martyr. La providence lui fit une grâce insigne en permettant son rappel à Dieu le 21 janvier 2019, le remerciant de son beau geste, et accordant ainsi une protection particulière à la Maison de France. Le signe était fort, au-delà du deuil…

Le 29 avril 1429 Sainte Jeanne d’Arc dit à Dunois (Déposition du procès de Jeanne) : « Je vous amène, dit-elle, le meilleur secours qui ait jamais été envoyé à qui que ce soit, le secours du Roi des cieux. Il ne vient pas de moi, mais de Dieu même qui, à la requête de saint Louis et de saint Charlemagne, a eu pitié de la ville d’Orléans ».

Ainsi, ce 8 mai 2021 marquait en même temps le 592ème Anniversaire de la libération d’Orléans et la fin des combats en 1945 ! Mais auparavant la ville avait déjà résisté victorieusement aux Huns, puis aux Normands. Etonnant destin de cette simple cité qui régulièrement marque l’histoire de France de manière éclatante et providentielle.

Ce jour du printemps 2021, leurs Altesses Royales arrivèrent à Orléans, dans un climat difficile marqué par la crise sanitaire et des polémiques stériles. Dés son arrivée en cette auguste ville, Monseigneur le Comte de Paris déclara « Cela fait toujours plaisir à un Orléans de venir à Orléans ». (La République du Centre, 9 mai 2021).

A la surprise de tous, ils furent reçus personnellement par le Maire d’Orléans, avant la Messe, ce qui de la part de Monsieur Serge Grouard n’était pas joué d’avance. Mais l’histoire réunit parfois ceux que la politique du présent pourraient séparer.

La très belle homélie de Monseigneur de Moulins-Beaufort Archevêque de Reims, restera le texte de tous les possibles – toute orientée vers la gloire de Dieu, avec un superbe final :

« La gloire du Père que Jésus veut procurer, et tous ses amis avec lui, est la vie de tous les humains, et cela pour toujours, dans la paix vivante de Dieu. Cette paix pour tous, cette paix vivante et pour toujours, nous la demandons et nous la recevons aujourd’hui comme hier et demain dans l’Eucharistie de Jésus et nous espérons, Dieu le voulant, Dieu aidant, en être les serviteurs, chacun selon la part qui lui est confiée, Amen. ».
Sous la protection de Sainte Jeanne d’Arc, Son Altesse Royale le Prince Jean de France a reçu le corps du Christ des mains de l’Archevêque de Reims, comme en son temps le Roi Clovis, le reçut des mains de Saint Rémi. Comment ne pas y voir un signe qui peut parler à tous, croyants comme simples spectateurs ? « Celui qui croyait au Ciel, celui qui n’y croyait pas », comme le dit Louis Aragon, peuvent se retrouver ici, aux confins de la foi et de l’histoire…
Ne peut-on pas dire alors, qu’en ce 8 mai 2021, à Orléans en l’année Saint Joseph, le Ciel de notre France s’est ouvert ! »

Restent alors aux hommes à faire que ce qui doit être advienne : pour la Monarchie royale, en France. Et, là encore, Jeanne d’Arc, la Sainte de la Patrie, nous le souffle, au-delà des siècles : « Les hommes batailleront, et Dieu donnera la victoire »…



La responsabilité environnementale nécessaire, de l’Etat aux citoyens.

Peut-on encore sauver la planète ? Et qui en a vraiment envie, pourrait-on rajouter si l’on est complètement désabusé ? Malgré les récents événements climatiques qui ont frappé nos voisins européens avec une violence qui nous paraît inédite, peu de choses semblent bouger, et la société de consommation a déresponsabilisé et infantilisé des populations qui ne pensent, désormais, qu’à leur nombril quand il faudrait voir plus haut. Et les politiques, qui devraient donner l’exemple, et les Etats, qui pourraient initier de véritables stratégies environnementales, en restent à la communication sans réflexion profonde, malgré les études scientifiques, industrielles et économiques qui s’accumulent : le ralliement à l’éolien sous toutes ses formes bétonnières apparaît comme l’alibi écologiste de nombre d’institutions politiques, gouvernementales comme régionales, et le moyen facile de se donner bonne conscience tout en privilégiant un système de consommation électrique toujours plus gourmand, le « tout informatique » devenant de plus en plus la norme, crise sanitaire aidant. Cette conception si peu écologique de la transition au même qualificatif devrait nous alerter sur les limites d’une écologie laissée (ou confiée) aux féodalités industrielles et aux politiciens à courte vue (celle-ci étant trop souvent limitée aux prochaines élections), et nous inciter à penser une nouvelle stratégie sur et pour le long terme, en réfléchissant aussi, dans le cas spécifique de la France, aux institutions susceptibles d’incarner au mieux le souci environnemental et de l’enraciner pour les générations à venir.

Mais toute politique écologique générale devra aussi entraîner une certaine adhésion des populations, voire la motivation forte d’une « minorité énergique » susceptible, par-delà l’action même de l’Etat, d’entraîner les populations moins motivées vers une acceptation raisonnée des enjeux et des bonnes pratiques environnementales. Ce n’est pas une mince affaire, comme j’ai pu le constater de visu à Carnac il y a quelques jours et comme je l’ai déjà raconté, déçu de l’attitude de nombre de nos concitoyens (mais pas de tous, Dieu merci !) : « Au soir du 14 juillet, j’étais venu assister au traditionnel feu d’artifice tiré à Carnac, en pays chouan. Installé sur la plage, au bord des dunes préservées depuis quelques années déjà (et c’est tant mieux !), j’ai constaté le peu de civisme écologique de quelques (trop nombreux, malheureusement) vacanciers : malgré les limites indiquées par des barrières (trop discrètes) et quelques poteaux, ceux-ci les ont envahies sans délicatesse. Je me suis alors permis d’intervenir, poliment d’abord, puis plus fermement ensuite, en leur indiquant que l’endroit sur lequel ils s’installaient était normalement interdit pour les promeneurs, et ceci pour permettre le maintien et le renouvellement de la biodiversité locale. Or, à plusieurs reprises, les envahisseurs ont refusé de partir, riant de mes conseils et, bientôt, de ma colère malheureusement vaine… Quelques uns, néanmoins, conscients de leur méprise ou n’ayant fait que suivre le mouvement d’envahissement, ont quitté les lieux, comme ce groupe de motards casqués et sympathiques qui n’avaient pas vu les panneaux d’avertissement trop peu nombreux près des barrières et qui entraînèrent d’autres personnes à passer sur la plage plutôt qu’à rester sur les dunes officiellement (mais bien mal) protégées ; mais beaucoup d’intrus sont restés sur place, allant jusqu’à dévorer pizzas et brioches de viande comme pour montrer le peu de cas qu’ils faisaient des lieux pourtant réputés et annoncés fragiles et, au-delà, de l’environnement. Pratiquement tous portaient, leur repas achevé, des masques bleus dont certains furent abandonnés sur place, avec quelques canettes, une fois le feu d’artifice terminé. En quelques dizaines de minutes, des lieux d’ordinaire préservés des pieds et des postérieurs ont été saccagés par l’égoïsme et la bêtise de quelques uns…

Que retenir de cette triste anecdote ?
D’abord l’absence de conscience environnementale de certains de nos compatriotes et l’indifférence de beaucoup d’autres devant les agressions contre notre environnement, même le plus proche ;
Ensuite, l’hypocrisie de ces mêmes agresseurs qui ne respectent les règles que lorsque la force publique (ici malheureusement complètement absente, car trop peu nombreuse devant le nombre de tâches à effectuer pour que la sécurité des spectateurs soit assurée) est visible et active ;
Enfin, le peu de moyens matériels et humains mis en œuvre pour préserver de façon efficace ces dunes, ici protégées par quelques obstacles et poteaux bien insuffisants face à la bêtise et à l’irrespect…

A quelques kilomètres de là, près d’Erdeven, les autorités ont visiblement trouvé une solution, simple et terriblement efficace contre les intrusions non souhaitées : une zone humide, située à quelques dizaines de mètres de la côte et dans laquelle l’on peut apercevoir libellules, batraciens, poules d’eau, hérons, etc., est protégée par une clôture renforcée de barbelés, mais sans priver les promeneurs du spectacle formidable d’une biodiversité riche et réconfortante. Sans doute faudrait-il reproduire cette protection visible sans être agressive pour préserver les richesses de biodiversité des dunes de Carnac… »

Le souci environnemental n’est pas partagé par tous, comme cette anecdote le démontre, et je crains que l’esprit même de la société de l’individualisme exacerbé ne soit un obstacle au respect des équilibres naturels. Il nous faut tenir compte de cette réalité mais ne pas s’en contenter, et inciter nos contemporains à adopter des attitudes plus appropriées à la préservation environnementale. Dans cette affaire comme tant d’autres, l’Etat ne doit pas être un « limitateur de libertés » mais un incitateur d’initiatives heureuses pour l’environnement, dans une logique du « Mieux vaut prévenir que guérir » : encore faudrait-il qu’il soit conscient de son rôle éminemment politique en ce domaine, et qu’il se délivre des pressions des féodalités financières et économiques qui, trop souvent, se servent de l’écologie plus qu’elles ne la servent vraiment ! Non par antagonisme à l’égard des entreprises mais par souci de les remettre à leur place qui ne peut être, dans l’ordre des priorités humaines, la première.

Stratégie politique de l’Etat sur le long terme, et diplomatie écologique de la France ; responsabilisation des acteurs publics, politiques, économiques et sociaux, mais aussi des citoyens ; valorisation du souci environnemental dans notre société, et exemplarité française… Voici, non un programme, mais la nécessité écologique pour l’avenir, non seulement français, mais international. Cela peut paraître terriblement ambitieux, et le chemin paraît même fort long et escarpé avant que d’atteindre les objectifs évoqués ci-dessus alors qu’ils ne sont, en fait, que les moyens de préserver les chances de la Terre et de nos terres elles-mêmes, de Carnac à l’Amazonie… Mais l’enjeu est d’importance, et l’histoire ne pardonnerait pas à la France d’avoir oublié ce qu’elle est et ce qu’elle peut, en ce domaine comme en tant d’autres.





Halte aux délocalisations spéculatives !

Les délocalisations sont devenues une banalité dans notre société contemporaine et dans cette mondialisation qui a cessé d’être heureuse pour les Français et, plus particulièrement, pour les classes moyennes et populaires. Il n’y a pas une semaine sans que telle ou telle entreprise n’annonce qu’elle ferme des usines en France pour les déménager dans des pays de l’Europe de l’Est, d’Afrique du Nord ou d’Asie, des pays où le coût de la main-d’œuvre est parfois dérisoire et dans lesquels les droits sociaux des travailleurs sont des plus réduits, voire inexistants. Sans même parler du respect des règles sanitaires les plus élémentaires et de celui de l’environnement…

Pour les entreprises qui délocalisent (y compris dans le secteur pharmaceutique), il s’agit de satisfaire aux exigences d’actionnaires peu regardants sur la manière dont leur argent prospère : or, le profit devient injuste quand il est oublieux de ceux qui travaillent.

Il est donc plus que temps de réagir avant de voir disparaître tout le tissu industriel français, tous les savoir-faire ouvriers, tous les emplois industriels…

Il est temps de réagir avant que la France ne soit plus qu’une simple « terre à touristes », aujourd’hui empêchés par la crise sanitaire de la Covid-19, et qu’elle soit incapable de produire autre chose que des dépliants publicitaires…

Que proposent les Royalistes Sociaux ?

– Favoriser les activités de Recherche pour permettre aux industries françaises d’innover et de produire en France, dans les secteurs traditionnels comme nouveaux : la matière grise est une des chances de notre pays et il faut lui permettre de développer ses potentialités pour éviter la « fuite des cerveaux », véritable « délocalisation intellectuelle ».
– Sanctionner les entreprises qui délocalisent et ferment des usines en France alors qu’elles font des bénéfices, par un système de taxes sur leurs produits fabriqués à l’étranger quand ils pourraient l’être dans notre pays.
– Promouvoir les entreprises qui choisissent de rester dans notre pays par un allégement de leurs charges et par une priorité donnée à celles-ci dans les travaux et les équipements des pouvoirs publics locaux.
– Lancer une politique de grands travaux en France comme la construction de la Grande Gare de Paris et une politique industrielle nationale digne de ce nom, sans négliger les possibilités offertes par les grands mouvements de la Transition énergétique comme de la Transition écologique.


Mais la République a-t-elle la volonté d’agir pour le Travail français, elle qui est de plus en plus soumise à une Union européenne qui ne pense plus qu’en termes de « libre concurrence » et interdit toute politique d’Etat de protection des emplois et des entreprises nationales ?

Si nous sommes Royalistes, c’est parce que nous sommes Sociaux et que nous pensons qu’il faut redonner au Politique les moyens d’agir et d’intervenir quand les droits sociaux sont menacés par « l’économie sauvage ». Pour cela, il faut penser et agir pour promouvoir un Etat politique capable de remettre l’économie à sa juste place sans négliger les impératifs sociaux : c’est la définition même de la Monarchie sociale française.

La France faite par ses rois, bien avant 1789.

Sous l’Ancien régime, la nation française existe sans que la notion soit toujours précisée en tant que telle : pour faire simple, il est possible de dire que, si l’Etat de France naît avec l’élection en 987 du roi Hugues Capet (et sans que le nom de France ne soit, d’ailleurs, accolé au titre de roi, ce qui n’adviendra qu’à partir de Philippe-Auguste), la nation française, elle, apparaît d’une certaine manière en 1214 avec la victoire de Bouvines et le soutien des bourgeois des villes aux armées royales de celui qui, alors, passe du statut de suzerain (« le roi des nobles », en somme) à celui de souverain (« le roi de France » et, désormais, des Français au-delà des simples liens féodaux). Mais la France est déjà la France, quelles qu’en soient les frontières et l’espace du moment considéré, et c’est en cela aussi qu’il est crédible de la qualifier de « nation », c’est-à-dire de cadre dans lequel est reconnue (sinon acceptée…) une autorité temporelle (politique) suprême, parfois sans beaucoup de pouvoir(s), et qui s’incarne alors dans « le » roi, qu’il faut comprendre au double sens de personne physique inscrite dans une suite familiale (qualifiée de dynastie) et de magistrature suprême de l’Etat, résumée à « l’Etat », terme employable ici dans le sens de l’instance de décision politique « supérieure » du royaume, au-delà des centres de décision locaux, féodaux ou communaux.

Au Moyen âge et jusqu’en 1789, la Monarchie construit la nation comme espace politique et géopolitique, inaliénable ou revendiqué comme tel (ce qu’évoquent les fameuses lois fondamentales du royaume, véritable constitution coutumière et traditionnelle), et sur lequel s’exerce la souveraineté de l’Etat royal sans, pour autant, supprimer toutes les autres instances de décision du pays, qu’elles soient politiques, administratives ou religieuses (mais aussi sociales et corporatives). « Les rois ont fait la France », affirmait un vieux chant royaliste (en l’occurrence « la Royale », hymne de l’Action Française depuis les années 1920), et ce n’est pas faux, si l’on précise bien le sens du verbe « faire » en cette occasion historique. Faire la France, c’est-à-dire en « construire » les contours territoriaux mais aussi fonder une culture politique d’Etat particulière, former une unité qui, au-delà des différences et des diversités (termes qu’il convient d’accorder pour que ce qu’ils recouvrent ne deviennent pas antagonistes), ordonne l’ensemble en un équilibre supérieur et « reconnaissable » autant à l’intérieur que pour l’étranger.

C’est l’espace de la Cité France (au sens de la « polis » tel que les Athéniens l’ont définie il y a 2500 ans) qui se construit au fil des siècles et qui permet, en 1789, d’avoir les frontières métropolitaines que nous connaissons encore aujourd’hui, à quelques exceptions et ajouts près (la Sarre en moins ; Avignon, Nice et la Savoie en plus), et qui forment « l’hexagone » identifiable sur les cartes depuis le XVIIIe siècle. Mais la nation n’est-elle qu’un pays, un territoire ? Bien sûr que non : elle est aussi une « unité » (terme préférable à « identité » qui renvoie trop à l’uniformité et à l’égalité jacobines) incarnée et garantie par l’autorité royale jusqu’à la Révolution, une « histoire d’histoires » dominée par celle de l’Etat royal (qu’il met en scène, d’ailleurs, par volonté d’une légitimation fondée sur les temps passés et la « gloire du roi ») mais complétée par une histoire « sainte » (autour de l’Eglise, de ses rites et doctrines, de ses saints parfois très locaux et de ses traditions enracinées dans des terroirs, y compris sous forme de superstitions ancestrales…) et des histoires « communautaires », mélanges de mémoires ethniques, « provinciales » (les provinces étant, d’une certaine manière, une « invention » de l’Etat royal unificateur et incorporateur pour garantir un sentiment d’appartenance à l’ensemble sans trancher les racines de mondes anciens parfois immobiles) et villageoises.

L’effort multiséculaire de la Monarchie pour « faire France » se traduit, au-delà de la conquête, du traité, du mariage ou de l’héritage, par la mise en place d’un appareil d’Etat (qui s’appuie aussi sur « l’apparat d’Etat » depuis les rois de la Renaissance et particulièrement le roi-mécène François 1er jusqu’aux rois versaillais) et d’une culture royale qui, bientôt, se fait nationale, en particulier à travers l’édit de Villers-Cotterêts qui fait de la langue du roi (la langue française) la langue des actes administratifs (en remplacement du latin, et non des langues locales) et la création du Collège des lecteurs royaux (aujourd’hui Collège de France), mais aussi l’Académie française. La Révolution, dans son surgissement et ses rugissements, croira faire œuvre originale en remodelant le pays selon un schéma rationnel et presque clinique, et cela au nom d’une conception idéologique de la nation (qui se doit d’être « une » comme la « volonté nationale » qui doit en être l’unique législatrice pour l’ensemble des territoires qui, eux-mêmes, se doivent d’être « égalisés », selon la conception des constituants de 1789-1795) ; en rompant avec ce qui avait fait, justement, la particularité (sans être forcément originale, à bien y regarder) de la nation française depuis les premiers capétiens, c’est-à-dire l’acceptation et l’incorporation des histoires et des enracinements immémoriaux, de ces multiples « traditions critiques » au sein d’un ensemble pluriel. La richesse culturelle de la France, de cette France aux mille blasons, sera fortement dépréciée par le jacobinisme d’Etat hérité de la Révolution et de l’Empire… Mais elle survivra, « malgré la République ». Et c’est aussi elle qui permet à notre pays d’être, jusqu’à la crise sanitaire, la première destination touristique mondiale…







Crise de la participation, crise de la République !

Crise de la participation, crise de la République…

En ce second tour des élections régionales et départementales, l’abstention reste « reine de France », avec des niveaux inégalés, et cela malgré les rappels à l’ordre des institutions de la République et des partis, plus moralisateurs que véritablement politiques. Doit-on s’en réjouir ? Non, car cela signale une maladie qui, au-delà de la République, atteint tout le corps civique français, au risque de compromettre toute politique et le sens même du politique dans une société désormais plus consommatrice que fondatrice…

Cette abstention semble, avant tout, une « réaction générationnelle », les jeunes étant les grands absents du scrutin en boudant les urnes de façon quasi-unanime, ce qui peut inquiéter et doit interroger : pourquoi cette absence volontaire ? Cela indique une méfiance générale des jeunes générations à l’égard d’un système qui ne les écoute pas, et dont ils n’attendent rien. Se contenter de ce triste constat, qui montre aussi l’échec total de la République contemporaine à « faire France », ne suffit pas et les Royalistes ne peuvent s’en contenter, évidemment : il apparaît urgent de restaurer le « souci politique » et de refonder du « lien politique », celui qui unit les Français autour d’un projet de longue mémoire et de long terme, la France. Il appartiendra aux Royalistes responsables de travailler à ce projet, au-delà des étiquettes politiciennes, non dans le ressentiment mais dans l’espérance et la foi en la France et en son destin. Car la France n’est pas finie, et rien ne serait pire que le désespoir qui, en politique, reste la sottise absolue !

De plus, pour redonner vigueur aux Régions, encore faudrait-il entendre les doléances du « pays réel », et, par exemple, celles qui portent sur la valorisation des cultures provinciales et la redéfinition des limites administratives trop souvent absurdes aujourd’hui : ce qui compte n’est pas la taille mais « l’âme » des provinces qui nécessite une nouvelle délimitation de ces dernières. Tout comme il est temps d’oser rendre aux provinces reconstituées des pouvoirs législatifs qui allègent l’Etat et lui permettent, ensuite, de se consacrer au mieux à l’exercice de ses vrais pouvoirs régaliens. « La France intégrale, c’est la France fédérale », disait « le plus ancien fédéraliste de France », le royaliste Charles Maurras.

La crise de la représentation en République ne pourra se résoudre par les habituels discours républicains faits de promesses vite oubliées : il faudra bien, logiquement, poser la question des institutions et, en prévision de « l’avenir que tout homme bien né souhaite à son pays », proposer la Monarchie royale comme réponse éminemment politique à la crise de confiance civique contemporaine.


Groupe d’Action Royaliste, le dimanche 27 juin 2021.


Abstention… Vous avez dit abstention ?

L’abstention spectaculaire lors de ce premier tour des élections régionales et départementales n’est pas une surprise, si ce n’est par son ampleur, inédite pour une élection nationale sous la Cinquième République. A celle-ci, nous distinguons plusieurs causes :


– La reproduction des clivages nationaux, souvent liée à une campagne trop « nationale » quand il s’agissait de voter pour les Régions et les Départements. Néanmoins, la « claque » infligée aux listes gouvernementales reste un signal fort du désaveu de la politique menée par l’actuel gouvernement, sans pour autant remettre en cause les fondements de celle-ci, puisque les listes « traditionnelles » restent dominantes, profitant d’ailleurs de l’abstention elle-même et de la « prime aux sortants » ;

– La « fatigue démocratique » qui est de plus en plus marquée dans notre pays mais aussi dans nombre de Démocraties occidentales, et qui semble liée au discrédit de la démocratie représentative considérée comme trop éloignée des attentes des électeurs concrets, comme l’avait déjà signalé la révolte des Gilets jaunes en 2018-19. Cette dernière se traduit, non plus par un vote protestataire, mais bien plutôt par une « absence électorale » ;

– Une centralisation trop marquée des pouvoirs en République qui empêche encore les Régions de jouer un rôle véritable dans la gestion des crises et la valorisation des atouts de chacune d’entre elles : trop souvent, le « pays légal » est, en fait, le « pays central », au risque de désespérer les citoyens des provinces. De plus, le découpage des Régions pratiqué par la République de M. Hollande au milieu des années 2010 empêche nombre d’électeurs de se reconnaître dans les grands ensembles régionaux, souvent trop artificiels et anhistoriques…

Le Groupe d’Action Royaliste ne peut évidemment se satisfaire d’une telle situation dans laquelle le « pays réel » (au sens global du terme) est si mal représenté et les intérêts des Régions si peu valorisés, et il en appelle à une refondation de la légitimité politique qui ne peut que passer, si l’on veut qu’elle soit efficace et pérenne, par l’instauration, dans les délais les plus raisonnables au regard de l’urgence française, d’une Monarchie royale et fédérale : celle-ci peut permettre, en rendant son indépendance de parole et d’action à la magistrature suprême de l’Etat, une nouvelle forme de représentation nationale, moins partisane et plus concrètement représentative de la pluralité française, de ce que l’on pourrait nommer « les pays réels de France ». De plus, elle autorise, par nature, « des démocraties locales » actives et utiles, au niveau régional, mais aussi communal, sans en oublier les dimensions sociales et professionnelles. C’est en rendant aux Français leurs pouvoirs civiques, à travers des institutions locales qui leur sont proches et dans lesquelles ils peuvent s’exprimer et agir, au-delà des structures de partis et des manœuvres politiciennes, qu’ils reprendront goût à l’engagement civique et électoral, nécessaire à l’harmonie sociale et à la continuité nationale et historique.



La Monarchie est-elle impossible ?

Dans le cadre d’une nouvelle enquête sur la Monarchie en préparation pour 2022, il s’agit aussi de répondre aux nombreuses objections faites à la Monarchie et, ainsi, de préciser les arguments pour celle-ci et son établissement en France. Nous reprenons des objections, des propos ou des remarques qui abondent dans la presse, parfois à l’école ou au comptoir des cafés (« le parlement du peuple » selon l’heureuse formule de Balzac), ou encore sur la toile, nouveau forum permanent.



Objection 1 : « Imposer la Monarchie à un pays ancré depuis si longtemps en République, cela est-il vraiment possible ? »

N’insultons pas l’avenir, dit l’historien comme le politologue : l’Histoire est pleine de surprises et d’imprévus, et elle ne suit pas un sens unique et obligatoire, au contraire de ce que pensaient les marxistes et de ce que pensent aujourd’hui les libéraux ou les européistes. Il faut être plein d’humilité face à elle et à ses circonvolutions, parfois heureuses, parfois terribles, souvent complexes, mais il ne faut pas renoncer à « la faire » ou, du moins, à en infléchir le cours, autant que faire se peut : il n’y a pas de fatalité « définitive » et se résoudre à celle-ci serait s’abandonner à tout Pouvoir sans limites (qu’il soit politique ou économique à travers les féodalités partisanes ou financières, par exemple), au risque d’y perdre toute liberté…

Certes, la possibilité d’une instauration monarchique en France paraît fort lointaine et, surtout, difficile, compliquée. Mais rien n’est impossible, et, d’ailleurs, « impossible n’est pas français », dit-on : l’exemple espagnol, maintenant un peu ancien mais proche de nous par la géographie, est la preuve que ce qui paraît hautement improbable en certains cas est toujours possible ! Le roi restauré par la volonté d’un dictateur n’a pas été son jouet, et Juan Carlos, que l’on croyait timide et emprunté, s’est avéré être un véritable Chef de l’État capable de mener la transition démocratique sans faillir ni défaillir (1), et, malgré les difficultés actuelles, la Monarchie perdure à travers son fils et successeur, Philippe VI (Felipe, en espagnol).

Pour la France, il y a, apparemment, le fort attachement des Français à 1789 et à ses suites institutionnelles républicaines. En fait, c’est beaucoup moins vrai ces dernières années, la recherche historique et la réflexion philosophique comme politique aidant… D’autre part, hormis le fait que la part « positive » de la Révolution selon l’opinion (qui n’a pas forcément raison au demeurant, selon le point de vue historique que l’on adopte) est antérieure à l’établissement même de la République en 1792, la Monarchie nouvelle n’aurait pas à entrer en conflit avec l’Histoire, fût-elle désagréable pour les rois et les royalistes, mais à l’assumer (ce qui ne signifie pas pour autant s’y « rallier »…) et à la dépasser. Car le regret n’est pas (et ne peut fonder) une politique et la Monarchie nouvelle, qui sera évidemment attendue sur ce point, devra veiller à ne pas être une nostalgie romantique ou revancharde : le roi, souverain de tous les Français, est celui qui relie toutes les traditions et toutes les histoires, en les assumant toutes, en tant que « trait d’union » institutionnel…





(1) : il ne s’agit pas ici de juger de la pertinence de la politique du roi d’Espagne Juan Carlos mais de considérer son succès stratégique alors qu’il paraissait condamné à être balayé par le vent de l’Histoire et de la révolution…

Célébrons Jeanne d’Arc !

Dans quelques jours, nous célébrerons Jeanne d’Arc, la sainte de la patrie : non par nostalgie mais pour nous souvenir de son exemple et pour nous en inspirer !
Lorsque tout semble perdu, il reste l’espérance et le combat nécessaire pour la faire advenir. Nous, Royalistes, espérons et militons pour la France, les libertés et ce qui permet la pérennité de l’une comme des autres : la Monarchie royale !

La Monarchie française, pour les libertés et contre la dictature !

Voici un argument que certains opposent régulièrement aux royalistes et auquel il nous semble utile de répondre : « La Monarchie, c’est la dictature, tout le contraire de la République… » Eh bien, non, la Monarchie, ce n’est pas la dictature tout comme la République, ce n’est pas la liberté, et nous le prouvons !


Dans l’histoire comme dans le projet contemporain, et c’est de la France dont il s’agit ici, la Monarchie n’est pas une dictature et n’a pas vocation à le devenir, même si la tentation d’un régime autoritaire a pu exister de la part de quelques royalistes lors du premier XXe siècle, furieux de la déliquescence d’une IIIe République qui laissait la voie ouverte à la puissance germanique et, bientôt, à l’occupation de notre pays.

Sous l’Ancien régime, la Monarchie était plus fédérative que centraliste, et les provinces, les villes, les métiers avaient de nombreuses libertés, des « franchises et privilèges » disait-on alors, au point que l’historien Funck-Brentano a pu parler d’une « France hérissée de libertés ». Cela n’empêchait pas la construction d’un État central qui s’imposait peu à peu à tous, à un rythme lent mais sans discontinuer et sans, sur le fond, attenter aux « libertés traditionnelles », cherchant plutôt l’équilibre que la démesure. Bien sûr, la nécessaire lutte contre les féodalités ne se faisait pas toujours dans la délicatesse et la raison d’État, en devenant un élément important de l’exercice et de l’essence même de l’État, a parfois justifié des mesures qui ressemblent à celles d’un état d’urgence contemporain. Comme tous les régimes humains, la Monarchie n’est pas « parfaite », en particulier parce qu’elle reconnaît, justement, l’imperfection des hommes, et qu’elle s’en contente sans vouloir forger un « homme nouveau », vieux rêve des utopies que les républicains de 1793 voudront mettre en application, obligés alors d’instaurer un régime de Terreur qui préfigure les totalitarismes du XXe siècle…

La Monarchie, aujourd’hui, ne serait pas plus une dictature qu’elle ne l’a été avant 1789 et de 1814 à 1848, cette dernière période étant celle de l’installation définitive d’un système parlementaire qui, sous les Républiques suivantes, a dégénéré en parlementarisme, au moins jusqu’en 1958 et l’instauration d’une République plus « monarchique » que les précédentes sans aller jusqu’à son terme institutionnel logique…

S’il y a l’exemple des Monarchies européennes, plus symboliques que décisionnaires, elles ne sont pas forcément représentatives des espérances monarchiques françaises. Mais elles montrent à l’envi que l’idéal monarchique n’a rien de dictatorial, et, dans le cas de l’Espagne, la royauté a permis et a mené une « révolution tranquille » qui, si elle peut parfois nous surprendre, a inauguré véritablement une pratique du débat politique décomplexé et un régime parlementaire classique selon les canons européens… Ce dernier exemple ne signifie pas que cette forme de la Monarchie soit exactement adaptée à la France, mais il montre les possibilités démocratiques offertes par une Monarchie locale.

La Monarchie « à la française », par son essence même, est la meilleure antidote à la dictature, y compris à celle de l’Opinion publique, souvent versatile et parfois inflammable : en ancrant la magistrature suprême de l’État dans le temps et dans les habitudes, au-delà des intérêts particuliers (et antagonistes, souvent) du moment et d’un lieu, elle peut jouer ce rôle de représentation diplomatique nationale et celui d’un trait d’union entre les diversités françaises, d’un arbitrage permanent et mesuré sans être omnipotent et hyperactif… En somme, tout l’inverse d’une République trop centralisée ou (et ?) trop féodaliste dont l’état d’urgence désormais presque permanent depuis 2015 apparaît comme la défense maladroite d’un régime qui ne croit même plus en sa légitimité propre…


La nécessité d’une démographie française soutenue.

La question démographique n’est pas une question secondaire, et le croire serait une erreur autant vitale que sociale : l’avenir d’un pays repose sur sa capacité à vivre et à transmettre et, quand la vie semble négligée, seules les ruines encombrent le paysage sans qu’elles ne parlent d’autre chose que d’un monde disparu, mort. Les peuples et les nations sont mortels, et pas seulement comme sociétés : l’histoire est un immense cimetière de civilisations, et de nombreuses chaînes de transmission ont été brisées faute d’entretien démographique, moral ou politique. Il serait fort dommage que la France (ce qu’elle est et porte dans l’histoire du monde et des hommes) disparaisse à son tour dans une globalisation d’amnésie bien-pensante et de féodalismes identitaires et techno-financiers, d’où ce souci démographique qui anime ceux d’entre nous qui veulent un avenir français sans, pour autant, méconnaître les autres manières d’être au monde.

Or, les chiffres de la natalité et de la fécondité françaises de cette dernière année ne sont pas bons et peuvent même paraître inquiétants : le taux de fécondité (le nombre d’enfants par femme en âge de procréer) s’établit pour 2020 à 1,84 et le nombre des naissances n’a jamais été aussi bas depuis… 1945 ! Entrons-nous dans un nouvel hiver démographique, ou n’est-ce que la conséquence passagère d’une crise sanitaire dont nous ne savons pas encore la fin ? Or, au début du premier confinement, l’idée courante (mais fausse) était que l’enfermement contraint allait provoquer une embellie démographique neuf mois après, ce que la réalité vient de cruellement démentir. En fait, la crise sanitaire a accéléré un processus antérieur qui voit la fécondité française diminuer et la natalité avec, sachant que, déjà, le nombre de femmes en âge de procréer a logiquement diminué ces dernières années, conséquence du premier « baby krach » du milieu des années 1970 et de l’élévation de l’âge de la première maternité (presque 31 ans en moyenne pour les femmes françaises aujourd’hui) qui « étire » ainsi la natalité dans le temps.

Mais l’une des causes principales de la baisse de la natalité est politique, ce que rappelle le démographe Gérard-François Dumont dans un entretien très instructif publié par Le Figaro dans son édition du vendredi 12 mars dernier, intitulé, avec raison, « La France paie le démantèlement de sa politique familiale » : « Si l’on considère les niveaux de fécondité des pays européens et les différentes politiques familiales, le résultat est clair : les pays dont la politique familiale est faible ont les fécondités les plus basses. Ceux dont la politique familiale est moins timorée ont les fécondités les plus élevées. Jusqu’au milieu des années 2010, la politique familiale de la France lui permettait d’avoir la fécondité la plus élevée d’Europe, un temps devancée seulement par l’Irlande. C’était une politique qui, avec ses multiples déclinaisons financières, fiscales et de facilitation de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, satisfaisait les Français. Puis, sous le quinquennat Hollande, un démantèlement systématique est intervenu : fin de l’universalité des allocations familiales ; diminution de l’équité fiscale ; réforme du congé parental rendant celui-ci considérablement moins attractif ; forte diminution de l’autonomie fiscale des collectivités locales contraintes de revoir à la baisse leurs systèmes de grade de jeunes enfants. » Ainsi, la politique pratiquée par les socialistes au pouvoir a oublié qu’il ne faut jamais mélanger les genres et que confondre politique sociale et politique familiale entraîne une déstabilisation de cette dernière : c’est bien ce qui s’est passé, et la chute fut brutale, le taux de fécondité passant de 2,01 en 2014 à 1,84 en 2020, ce qui s’est concrètement traduit par une baisse significative du nombre de naissances.

Or, cette nouvelle situation démographique a des conséquences sociales et pas seulement sur les moyen et long termes, comme le souligne M. Dumont : « La dénatalité exerce des effets économiques à court terme sur la demande et sur le dynamisme économique, puisque l’enfant est un élément « actif » de l’économie. A moyen terme, c’est la population active qui diminue, par conséquent un potentiel moindre de création de richesses. » Des naissances en moins, ce sont des classes en moins, des professeurs en moins, des écoles en moins, et cela dès les premières années après le « creux » de la natalité : « En France métropolitaine, il naît désormais 100.000 enfants de moins qu’il y a dix ans. C’est un phénomène spectaculaire », explique dans la même édition du Figaro Yvon Sérieyx, chargé de la conciliation vie familiale-vie professionnelle à l’Unaf, et c’est un phénomène qui n’incite guère à l’optimisme.

Mais il y a un autre souci économique et social, c’est le financement des retraites qui risque d’être lourdement impacté par cette baisse de la natalité française, et cela dans un délai de quelques décennies, affectant aussi le système de santé ainsi que celui de l’assurance-chômage, du moins si le système d’une « solidarité nationale » effective et inter-générationnelle (retraites par répartition, sécurité sociale, etc.) perdure, ce qui reste à défendre face aux pressions de la mondialisation dérégulatrice et d’une Union européenne moins protectrice que ne peut l’être, malgré tous ses défauts (et ils peuvent être lourds…), l’État français hérité des années 1936-1962…

Alors, que faire ? Il serait évidemment nécessaire que l’État, qui n’est pas pour autant le maître des chambres à coucher, travaille à la mise en place d’une véritable stratégie, non pas seulement nataliste, mais familiale au sens le plus complet du terme, et qu’il s’appuie sur tous les acteurs économiques (sociaux, « corporatifs » et locaux) de l’ensemble français, pour la faire advenir : en somme, « susciter plutôt qu’imposer », en favorisant les familles et en soutenant les parents isolés, et toutes celles qui souhaitent avoir des enfants et en sont empêchées par les difficultés économiques du moment ou par les contraintes du milieu professionnel. Car il est un élément à prendre en compte, c’est le désir d’enfants en France qui est, pour les femmes en âge de procréer, de 2,3 : un chiffre supérieur à ceux que nous constatons aujourd’hui et qui est une promesse et une espérance si notre société sait répondre à cette attente ! Bien sûr, de la théorie à l’effectivité, il y a parfois une marge importante, mais il semble que l’enjeu en vaut la chandelle. De plus, il faut rendre aux familles et à leurs enfants qui sont « les parents de demain » des perspectives d’intégration au monde du travail et des possibilités d’une meilleure qualité de vie, et promouvoir une politique audacieuse d’aménagement des territoires, fondée sur le désir de plus en plus fort d’une vie extra-urbaine par exemple (désir exprimé par une part croissante de la population) ou d’une alternative « heureuse » à la société de consommation. En fait, ce ne sont pas les pistes qui manquent, et c’est aussi ce qu’avance le Haut-commissaire au Plan François Bayrou en train de préparer une note sur ce sujet. Encore faut-il que ce souci démographique ne soit pas la proie des seuls économistes, mais qu’il devienne une des priorités de l’État : en ce domaine comme en d’autres, « Politique d’abord » ! C’est la volonté politique qui peut permettre un rétablissement durable de la natalité, non dans l’excès mais dans la mesure et la raison qui, toujours, doivent guider l’action politique envers la société et les citoyens. La République en est-elle encore capable ? Il n’est pas certain que la réponse soit positive…

Mais, la bonne santé démographique d’une nation n’est pas la seule condition de la force de celle-ci, même si Jean Bodin expliquait au siècle de François 1er que, vraiment, « il n’est de richesses que d’hommes » : il faut y ajouter l’envie de vivre et de transmettre, le besoin de cette amitié nationale qui favorise l’unité des peuples du pays autour d’un axe fédérateur et qui doit s’imposer aux égoïsmes individuels ou communautaires, tous nécessaires mais devant être apprivoisés pour ne pas être empoisonnés… Que la Monarchie royale en France puisse s’apparenter à un État-famille, et que la France soit une « famille de familles », pourrait aider à la vie pérenne et toujours renouvelée de ce pays, « le plus beau royaume qui soit sous les cieux »…