«…beaucoup de peine à arrêter la fougue de nos Canadiens qui, faisant de grands cris à la façon des sauvages, ne demandaient qu’à jouer des couteaux » d’après le chevalier de Troyes lors de la prise du fort Moose en 1686…
nouvelle-france
Hurons et Iroquois
Kebbec (rétrécissement du fleuve en Algonquin) , je me souviens…400 ANS
« Les os de nos frères blanchissent la terre, ils crient contre nous ; il faut les satisfaire.Peignez-vous des couleurs lugubres ; saisissez vos armes qui portent la terreur.Que nos chants de guerre, nos cris de vengeance réjouissent les ombres des morts » Chant entonné par les sorciers Algonquins, Nippissings et Hurons, rapporté par Champlain pour l’emmener à la guerre…
L’arbre fait parti des éléments de la nature que l’on respecte ainsi que le soleil « Areskoui » pour les Hurons et « Agrishoué » pour les iroquois…En 1615, Champlain décrivait le pays Wendake (la Huronie), comme un petit territoire occupé de nombreux villages comme Cahiagué de 200 cabanes protégé par une triple palissade de bois.Les Wendats (Hurons) quitteront ce pays en 1650 par la pression des Iroquois et les terribles épidémies, notement de variole.La confédération Wendat comprenait les Attignawantan ( tribu de l’ours), les Attignaenongnehac (tribu de la corde), les Arendaronon ( tribu du rocher), les Tahontaenrat (tribu du daim) et les Ataronchronons (tribu du marais).
Les Wendats s’éparpilleront, plusieurs centaines vers Québec auprès des missionnaires et d’autres chez les Tionontati (Petuns) et les Atiwendarons (Neutres).Nombreux seront assimilés par les Iroquois, leurs cousins.Bien avant l’arrivée des Français, les guerres inter-tribus étaient terribles, les prisonniers étaient soit adoptés et intégrés, soit torturés à mort et tué.Les Hurons habiles commerçants, achetaient des peaux de castors aux « Pays d’en haut » pour la revente…Ils disaient à Champlain «Habitez notre pays, amenez-y femmes et enfants de sorte que vous voyant vivre et cultiver vos terres, nous apprendrons plus en un an qu’en vingt à ouïr discourir ».L’alliance militaire avec les Wendats et les Français dâte de 1616.Les Hurons, nom donné à cause de la coiffure en hure de sanglier, appelé Wandats (Ouiendats), en quittant leurs frères Iroquois furent considérés par ces derniers comme des traitres qu’il fallait détruire.
Les Iroquoiens, représentent une variété linguistique spécifique comprenant les Wandats, les Cherokees, les Eriés ou Andastes, qui seront éliminés par les 5 nations.Les Rotinonsionni (confédération Iroquoise)des 5 nations puis 6, comprenaient les Kanienkehaka (Agniers ou Mohawks), les Oneiouts ou Oneidas, les Onondagas, les Sénécas ou Tsonnontouans, les Cayugas ou Goyogouins et les Tuscaroras. Ce sont des peuples sédentaires (Hurons et iroquois) qui cultivaient le tabac, la courge, le maïs et le haricot et vivaient de la cueillette, de la pêche et de la chasse. Ils introduisirent l’agriculture dans l’est Américain. «Groupés en villages, ces guerriers sédentaires vivaient dans de vastes cabanes.Chaque village, entouré de palissades, était ceinturé par des champs où la culture du maïs dominait…situation géographique, leur nombre, leur organisation et leurs vertus guerrières en faisaient des adversaires redoutés » ( B.Lugan, La Louisiane Française ).
Imaginons partager un repas avec nos frères amérindiens, écoutons Jacques Jaubert dans « Le Baron Sauvage »: « La Sagamité était une bouillie indéfinissable…Il y nageait des morceaux d’un aliment qui, à l’odeur, devait être du poisson…La bouillie était du blé d’Inde pilé, torréfié, que l’on ne pouvait avaler d’un trait car il s’y trouvait de grosses fèves à moitié cuites.Le tout avait un goût de poisson, mais un poisson qui aurait oublié depuis longtemps sa rivière, et de graisse rancie… ».
Les iroquois furent chassés du haut du saint Laurent par une confédération de langue algonquine composé de Micmaques, d’Algonquins et de Montagnais(1610).Les Iroquois vainquirent vers 1628 leurs rivaux de la confédération Mohicanne.Ces guerres intertribales et la guerre du Castor (fourrures pour les occidentaux) épuisèrent les tribus. Les Iroquois belliqueux continuèrent à assoir leur prédominance en guerroyant contre les Hurons(Wyandots) , Petuns(Wyandots), Algonquins et Neutres (1649-1651), les Chats (Eriés) de 1653 à 1656.Pour comprendre la situation de l’époque, en 1649, face aux 25000 iroquois bien armés et aux britanniques, les français avaient 400 soldats…
Peter Stuyvesand, gouverneur néerlandais, le 7 Avril 1648 donna des consignes pour délivrer quelques 400 mousquets aux iroquois, donnant une supériorité manifeste sur les autres tribus. « Les descendants des François qui s’habitueront audict pays, ensemble les sauvaignes qui seront ammenés à la connoissance de la Foy et en feront à leur mieux profession, seront censés et réputés naturels François.S’ils viennent en France, jouiront des mesmes privilèges que ceulx qui y sont nés »(Richelieu, Compagnie des Cent-Associés).La conception Française fut de pacifier les nations s’entretuant au Nouveau-monde et donc éviter la distribution d’armes à feu, ce qui entraîna la quasi disparition des Hurons nos alliés.
Ce genre de disposition, toute emprunte d’humanisme, nous coûta cher. En 1634, 1636 et 1639 des épidémies de rougeole, variole, dysenterie et grippe (1 Huron sur 2) les décimeront. Cela devient une chance pour les Iroquois, peuple courageux, endurant et très entrainé voyant enfin l’opportunité d’écraser la nation rivale Wandat, insouciante, apathique et mal organisé. Les Hurons deviennent après leur massacre par les Iroquois, les enfants du Roi de France, écoutons Kondiaronk en 1682 disant à Frontenac : «Sarestsi ton fils, Onontio, se disoit autrefois ton frere, mais il a cessé de l’estre car il est maintenant ton fils, et tu l’as engendré par la protection que tu luy a donnée contre ses ennemis ».Les Hurons, diminués s’allieront à la « Confédération des trois feux » du Pays d’en haut, dont faisait parti les Sauteux, les Pouteouatamis et les Outaouais.D’autres viendront rejoindre cette association comme les Sioux, les Miamis et les Illinois.Ces derniers demanderont même, après le funeste « Traité de Paris en 1763 » de venir s’installer en France. « La sainte iroquoise Tekakouita, qui supporte dignement les plus lourds sacrifices avec la joie de les offrir à Dieu…Certaines conversions sont restées fameuses. Celle, par exemple, du grand chef iroquois, Garakonité »(Raymond Douville et Jacques Casanova,Les Colons de Dieu,Historama, Juin 84)
Des Iroquois, alliés des Anglais depuis notre choix premier d’aider les Hurons, convertis à la religion chrétienne, viendront s’installer à l’abri des Missions et serviront de supplétifs aux commandos Franco-indiens dans les attaques contre les Britanniques.« Les plans de colonisation anglaise ne tenaient aucun compte des tribus indigenes.Dans les combinaisons françaises, les indigènes étaient tout en tout. La politique espagnole anéantissait l’Indien. La civilisation anglaise le dédaignait en lui faisant sentir son mépris. La France , seule, savait l’accueillir et s’en faire aimer »d’après l’historien de Boston,Parkman.Quand aux Cherokees (Géorgie), ils resteront de fidèles alliés aux Français de Louisiane.Après l’épuisement de nos forces en 1760 et le ralliement des Chactas sentant le vent tourner en faveur des Britanniques, les Cherokees feront seuls, face aux Chactas et Chicachas alliés aux Britanniques.Ils sauveront la Louisiane par leurs attaques redoutables…Les Hurons-Wendats sont aujourd’hui autour de 8000, sachant qu’en 1535 ils étaient entre 30 à 40000…Si vous allez au Canada, allez voir nos frères Wendats qui vivent au village Huron de Wendake à Loretteville près de Québec.D’autres, les Wyandots (Wendats américains) sont éparpillés dns l’Ohio,le Michigan, Kansas et Oklahoma.
N’oublions pas.
Frédéric WINKLER
La Grande Paix de Montréal
«La civilisation espagnole a écrasé l’indien ; la civilisation anglaise l’a méprisé et négligé ; la civilisation française l’a étreint et chéri » Francis Parkman, historien Américain
PREAMBULE
Que dire de mieux en guise d’introduction. Il faut rappeler sans cesse, certaines choses importantes comme la note de Richelieu inscrite dans « La charte de la Compagnie des Cent Associés » et cité dans le livre « La Nouvelle France » d’Eugène Guénin disant : « Les descendants des Français qui s’habitueront au dit pays (le Canada), ensemble les sauvages qui seront amenés à la connaissance de la Foi , et en feront à leur mieux profession, seront censés et réputés naturels Français. S’ils viennent en France, jouiront des mêmes privilèges que ceux qui y sont nés », donc les indiens convertis pouvaient être des sujets du Roi. L’illustration significative, dont les Amérindiens nous sont encore reconnaissants, à une époque où ils se massacraient allègrement, fut « La Grande Paix de Montréal de 1701». Alors qu’en Virginie, on achète les premiers esclaves noirs. Chez les Indiens, la guerre est une raison d’être, comme le dit Yves Cazaux : « Le moindre traité commercial, c’est-à-dire de paix et d’amitié, doit comporter une clause d’alliance contre les ennemis des contractants. La paix devient dès lors une cause de guerre ». Nous réussîmes le projet fou d’unir les nations indiennes d’Amérique dans une grande paix sous l’œil bienfaiteur du Roi de France Louis XIV. S’il fallait résumer notre action coloniale en Amérique, cet événement serait hautement symbolique.
« Les descendants des François qui s’habitueront audict pays, ensemble les sauvaignes qui seront ammenés à la connoissance de la Foy et en feront à leur mieux profession, seront censés et réputés naturels François.S’ils viennent en France, jouiront des mesmes privilèges que ceulx qui y sont nés » (Richelieu, Compagnie des Cent-Associés).
Le terme de père est accepté de toutes les nations indiennes parlant du Roi, du gouverneur ou de ses officiers. On entre alors dans une conception familiale d’alliance. Il est vrai que les deux cultures n’ont pas la même définition du rôle paternel, pour les Français c’est l’autorité, pour les Amérindiens c’est la générosité protectrice. Le Moyne de Maricourt reçut au mois de juillet 1700 à Montréal, six représentants de la confédération Iroquoise en vue de traité de paix et invitèrent le gouverneur de Montréal ainsi que La Joncaire (aussi adopté par les indiens) et le missionnaire père Bruyas à venir ramener les prisonniers de leurs cantons. Il fallut concilier les tribus comme les « Iroquois ayant attaqué dans leurs territoires de chasse des Miamis dont ils avaient tué plusieurs, ils n’avaient pas à se plaindre d’avoir à leur tour subi de justes représailles » ( La Nouvelle France ).Ce préambule à la Grande Paix était représenté par 19 représentants Hurons, Outaouais, Abénaquis et iroquois chrétiens, écoutons R.Guénin ( La Nouvelle France ) : « l’orateur des cantons exposa brièvement que les Iroquois avaient renoncé à faire la guerre aux alliés des Français, et qu’ils étaient venus à Montréal malgré la défense du gouverneur anglais qui pouvait vouloir s’en venger ». Les indiens espéraient trouver dorénavant à Montréal ce qu’ils n’obtiendraient plus des Anglais, vivres et armes. Tous acceptèrent les conditions de paix et signèrent l’acte le 8 septembre 1700 annonçant celui de l’assemblée générale de 1701.Au bas de l’acte figurent les signes distinctifs des nations présentes : les Onnontagués et les Tsonnontouans par une araignée, les Goyogouins par un calumet, les Onneyouts un bois en forme de fourche, les Agniers par un ours, voilà pour les Iroquois.Les Hurons par un castor, les Abénaquis par un chevreuil et les Outaouais par un lièvre…Le gouverneur M.de Callières envoya M.de Tilly de Courtemanche solliciter ceux des nations « d’en haut » absents aux pourparlers de paix en vue du grand rassemblement de 1701. Pendant l’hiver, inlassablement et avec l’art et l’expérience dans les palabres et discours, habitués aux tractations avec les Amérindiens.Il obtint l’adhesion des nations les unes apres les autres : Outaouais et Hurons de Michillimakinac et Miamis, Poutéouatamis, Sokokis, Outagamis, Illinois, Mascoutens, Sakis, Puants, Maloumines et Kikapous au sud des lacs… « Délivrance des prisonniers, apaisement des luttes intestines, des amours-propres froissés, toutes les difficultés furent surmontées et Courtemanche, ayant réuni les députés de ces nations, partit de Michillimakinac pour Montréal à la tête de cent quatre-vingts canots… » (R. Guenin, La Nouvelle France )
L’entente commune de « La Grande Paix de Montréal de 1701 » reste le caractère intemporel de la Monarchie depuis St Louis, le recours à l’arbitrage dans les conflits de la personne du Roi de France symbolisé ici par son représentant gouverneur ou Ononthio pour les indiens. La main de justice venant du fond des âges, depuis les rois bibliques comme Salomon et renouvelé ici au fond des forêts touffues d’Amérique du nord. « jamais dans le passé les tribus indiennes n’auraient pu imaginer un tel rassemblement » (Jacques de Vanssey, L’Amérique Française, enjeu européen, 1524-1804).Reste l’exemple du gouverneur Frontenac qui devant les représentants des tribus Outaouais et Huronnes se livra à une démonstration significative en direction des Iroquois belliqueux. Il décrivit des cercles avec une hache autour de sa tête en entonnant un chant de guerre, puis la remit aux chefs indiens présents comme le veut la coutume et ils firent de même en dansant… « Ce dut être un spectacle inoubliable que celui de ce vieillard, en grande tenue de gouverneur, donnant ainsi le signal violent d’une fête de sauvages ; ceux-là seuls pouvaient regretter qu’il renonçât un instant à la dignité de sa charge, qui ne comprenaient pas la valeur sur l’esprit des indigènes d’une semblable manifestation» (Lorin) Le gouverneur et ses officiers, costumés des plus beaux atours et enrubannés n’hésiteront pas aux démonstrations en pleine foret pour épater leurs alliés Amérindiens, comme couper un arbre, les tailler et construire une cabane.
«Accueillis par les sauvages chrétiens de la résidence, les envoyés entrèrent dans un grande cabane…douze sauvages se mirent en rond au milieu de la cabane, chacun tenant une petite calebasse pleine de pois, et chantèrent le calumet en remuant leurs gourdes en cadence. Un chef outaouais, debout derrière les chanteurs, tenait ce calumet »( La Nouvelle France ).On imagine l’ambiance qui devait régner mais écoutons La Potherie : « On avait attaché une brasse de tabac à une perche ; un chef se leva un quart d’heure après le commencement de cette chanson du calumet et, prenant une hache, il en frappa un poteau. Les musiciens se turent aussitôt. « J’ai tué quatre Iroquois il y a cinq ans à tel endroit», et, arrachant un bout de ce tabac, il le prit comme une médecine pour se refaire l’esprit. Les musiciens applaudirent par des cris et un mouvement précipité de leurs gourdes, et l’on entendit le bruit de deux à trois cents sauvages d’un bout à l’autre de la cabane à peu près comme celui d’une mousqueterie qui se perd dans une forêt ou dans les rochers. Tant que le tabac dura, on ne manqua pas d’acteurs qui citèrent leurs beaux exploits. On apporta trois heures après six chaudières pleines de chiens et d’un ours que l’on expédia en un moment. On dansa ensuite. Le soir, on servit huit grandes chaudières pleines de maïs bouilli et chacun en remplit son écuelle de bois ».
Le lendemain, une marée de canoë arrive à Ville Marie, l’ile de Montréal. Mille deux cent Peaux-Rouges, trente représentants de nations aussi diverses que l’étendue de l’Amérique se présentent, accueillis au bruit du canon des grandes occasions sous les cris de joie de la population. Des centaines de canoës, des captifs retrouvant la liberté, des cadeaux et des provisions, ils cabanèrent et on amena des branches d’arbre pour les protéger du soleil. Le chef Huron Kondiaronk, dit Le Rat, très influent, déclara à M de Callières : «Notre père, tu nous vois auprès de ta natte ; ce n’est pas sans beaucoup de périls, que nous avons essuyés dans un si long voyage. Les chutes, les rapides et mille autres obstacles ne nous ont point paru si difficiles à surmonter par l’envie que nous avions de te voir et de nous assembler ici». Le gouverneur de Callières les remercia, celui-ci sans avoir le prestige de Frontenac « …en possédait tout le solide, des vues droites, une fermeté toujours d’accord avec la raison, un grand sens, beaucoup de probité et d’honneur, et une pénétration d’esprit à laquelle une grande application et une longue pratique avaient ajouté tout ce que l’expérience peut donner de lumières ; il avait pris dès le commencement un grand empire sur les sauvages qui le connaissaient exact à tenir sa parole et ferme à vouloir qu’on lui gardât celles qu’on lui avait données »(Charlevoix). Le 1er Aout, pendant qu’un chef Huron parlait, Kondiaronk se sentit mal. On le mit dans un fauteuil et il parla. Il était très écouté de tous. Heureux de l’union des nations indiennes sous les lys de France et dans la nécessité de la paix. « Ce grand chef tint lui seul toute l’audience, malgré l’état languissant où il était. Les nations l’écoutaient avec admiration et, à chaque affaire différente dont il parlait, elles l’applaudissaient par des tons de voix qui partaient du creux de l’estomac, dont les sauvages ont coutume de se servir» ( La Potherie ).Il mourut dans la nuit. Une grande tristesse endeuilla ce grand jour de paix. Imaginons ce grand moment d’histoire ou côte à côte se trouvent des Amérindiens qui se massacraient la veille et cela depuis des siècles.
Les chefs Iroquois vinrent pleurer la mort du grand guerrier aimé et admiré de tous et offrirent des cadeaux aux Hurons, pourtant ennemis la veille. Il est enterré en grande pompe le 3 Aout et suivant la tradition, une chaudière de cuivre à droite, une épée et un fusil à gauche. M.de Frontenac « lui avait en effet conféré le rang de capitaine et lui en faisait remettre le solde…» ( La Nouvelle France ). Tout le monde y participe en grande tenue, soldats sous le commandement de M.de Saint Ours, Amérindiens aux multiples couleurs et plumes et fermant la marche le gouverneur M.de Vaudreuil et les officiers. Ce chef Chrétien est enterré dans l’église. Dans le doute d’une fin des négociations, le chef Aouenano des Tsonnontouans (Iroquois) rassure l’assemblée en célébrant les désirs de paix, s’en suit des palabres incessantes sur les modalités de commerce et calumet de bouche en bouche, échanges de ceintures de porcelaines et question de territoire…Placé bien en vue des représentants des Nations, M.de Vaudreuil accompagné des officiers écoutaient, tels St Louis sous le chêne, les doléances des uns et des autres. Il commença à s’exprimer en signifiant qu’il désirait les voir déposer les haches et fraterniser : « conclure la paix entre eux, et leur faire connaître que désormais il voulait être le seul arbitre de leurs différends ; il les invita à remettre leurs intérêts entre ses mains, promettant de leur rendre toujours justice et, s’il arrivait quelque désordre, de punir les agresseurs. »(R.Guénin).Des traductions dans les différentes langues furent distribuées, aux Abénaquis et Algonquins par le père Bigot, aux Iroquois par le père Bruyas, aux Miamis, Illinois et peuples de l’Ouest par Nicolas Perrot, les Hurons par le père Garnier, aux Outaouais par le père Anjelran…Grande gaieté et joie en ressorti, beaucoup d’espérance avec effusion de sympathie comme les indiens savent faire, quel grand moment ce devait être. « afin que le traité fût scellé d’une manière inviolable, trente et un colliers furent distribués aux chefs des nations qui s’avancèrent successivement pour les recevoir et remettre leurs prisonniers au gouverneur. Chacun d’eux prononça un discours ; ils dirent tous qu’ils sacrifiaient leurs intérêts particuliers à la paix générale, et qu’ils obéissaient surtout au désir de contenter leur père Onontio. » (R.Guénin, La Nouvelle France ).Les tenues chamarrées pour certains, le ton grave pour d’autres avec parfois une attitude ou des vêtements moitié européanisés, faisaient du moment quelque chose en dehors du temps. Le chef Outagamis, le visage peint de rouge saluant come d’un chapeau avec les restes d’une perruque poudrée sur la tête…
Celui du Sault St Marie avec les plumes en rayons derrière la tête… « celui des Poutéouatamis s’était coiffé avec la peau de la tête d’un taureau dont les cornes lui pendaient sur les oreilles…Le chef des Algonquins, vêtu en voyageur canadien, avait accommodé ses cheveux en crête de coq avec un plumet rouge qui pendait par derrière. C’était un grand jeune homme qui, à la tête de trente guerriers dont le plus âgé n’avait pas vingt ans, avait défait et tué auprès du fort Frontenac le principal chef de guerre onnontagué, la Chaudière noire, un de nos adversaires les plus redoutables » ( la Nouvelle France ). Ils fumèrent la pipe offerte par les Miamis, M.de Vaudreuil, M. de Champigny, M. de Callières, les chefs Iroquois et les autres Nations…Trois bœufs coupés dans dix grandes chaudières furent consommés. « La politique française éleva en quelques jours des barrières qui subsistèrent un demi-siècle et dont le premier effet fut de paralyser l’action des colonies anglaises dans la guerre qui allait bientôt intervenir » (Garneau) et comme le dit si bien Mr Guénin dans son magnifique livre sur la Nouvelle France , cet acte eut « une influence considérable sur toutes les nations indigènes, en établissant entre elles et nous une espèce de droit international. » .Tous les chef indiens reçurent des présents du roi de France pour cette occasion et chacun repartis avec un autre regard rejoindre sa tribu. Pour ramener les prisonniers oubliés, Maricourt rentra avec les Onnontagués(Iroquois) et Joncaire avec les Tsonnontouans(Iroquois).Même les Agniers, arrivés en retard, pour ne rien perdre de cet événement, s’excusèrent et signèrent de leur signe distinctifs les accords passés, échangèrent des cadeaux et repartirent. Voilà la grande œuvre rêvée et entreprise par le regretté gouverneur sieur de Frontenac et magnifiquement réalisé par son successeur M.de Callières…
«Le lendemain, solennellement conclu, le traité marque le tournant capital de la politique française en Amérique. Ses conséquences se poursuivront bien au-delà de sa présence sur le continent. Ce succès illustre en même temps le génie de la colonisation française en Amérique et son pouvoir d’adaptation au milieu indien. Ratifié plus tard par les Agniers, absents aux débats, le traité marque la fin d’un conflit ouvert depuis Champlain et qui a failli, aux heures les plus sombres, être fatal à la présence française. » (Jacques de Vanssey).
Le gouverneur ancra les accords par la disponibilité de marchandises à bon prix au fort Détroit, reconstruit grâce à sa bonne diplomatie en accord avec les Iroquois de l’endroit. Il gagnait aussi sur le tableau de la proximité des postes britanniques qui perdaient de ce coup leur influence dans la région… M. de La Mothe-Cadillac en fut responsable avec un renfort d’une centaine d’hommes de garnison.
« Car il ne faut pas oublier que de tous les étrangers qui ont abordé ou aborderont en Amérique, les Français sont les seuls à y avoir été invités par les autochtones » Jean Marc Soyez (spécial Canada, Historama, Juin 1984)
Frédéric WINKLER
Antoine Laumet dit Lamothe-Cadillac
« Mila Diu ! y a qué lous Gascoun per fa aco ! » (Mille Dieu ! Il n’y a que les Gascons pour faire cela)
« De voir une assemblée de Français sans reproches, mépris, envies et noises de l’un à l’autre, c’est autant difficile que de voir la mer sans ondes » Samuel de ChamplinC’est un personnage qui ne fait pas l’unanimité par son comportement comme pour le reste. Il faut le considérer comme un aventurier qui, en servant la France , s’est bien servi aussi !!! Est-il le seul…Arrivé en Acadie, autoproclamé officier avec un nouveau nom, vit dans un univers et croit lui-même en ses mensonges de méridional poussés à l’extrême. Un temps corsaire avec Guion, il épouse sa nièce et écume avec lui les côtes anglaises.Il participe, en Juillet 1687 avec le Marquis de Denonville dans l’expédition contre les Tsonnontouans (iroquois). «Revenant de ma mission d’information, je fus aussitôt enrôlé dans cette expédition punitive avec François Hertel, Maricourt et son frère Pierre Le Moyne d’Iberville, trois coureurs des bois particulièrement bien entraînés et combatifs.Après de brèves mais rudes escarmouches, nous boutâmes les Anglais hors des forts et humiliâmes à jamais une bande d’Iroquois, les surprenant une nuit dans un campement : les uns, assis sur un ployant, s’accompagnaient languissamment sur un théorbe désaccordé et chantaient des chants d’amour ou dansaient des sarabandes, les autres badinaient, batifolaient ou se lutinaient entre eux, le genou cagneux enserré dans des rotondes de rubans, vautrés çà et là, cul à l’air, dans l’avoine de leurs chevaux ! » (Robert Pico, Cadillac, l’homme qui fonda Detroit). Il se crée des inimitiés mais aussi des amitiés en la personne du gouverneur Frontenac.Il est envoyé en mission et donne satisfaction, se voit nommé capitaine et obtient le poste de commandement du fort de Michillimakinac dans l’ouest. Il participe à la défense de Québec avec le gouverneur Frontenac contre l’invasion britannique de Phips : »Des soldats à pied attaquèrent par vagues successives, tentant d’ébranler les montures des palissades ou de les escalader ; ceux qui parvenaient à passer étaient cloués à coups de flèche ou de lance, dépecés en trois coups de couteau et jetés en morceaux aux chiens indiens qui attendaient leur pitance…Le lendemain, nos assauts furent encore plus efficaces, mettant hors de combat deux navires et cinq ou six chaloupes.Phips et Walley furent contraints d’interrompre momentanément leurs tirs, et de s’aller réfugier dans les baies de l’île d’Orléans pour réparer leurs bâtiments endommagés. Puis, peut être par manque d’outillage ou de techniciens compétents, ils levèrent le siège et battirent en retraite vers le Massachusetts, perdant plusieurs navires à cause des intempéries ; l’un d’eux se fracassa contre les rochers d’Anticosti, et plus d’une cinquantaine de marins anglais périrent dans les eaux »(Robert Pico, Cadillac, l’homme qui fonda Detroit).
Il fait fortune en 3 ans, exceptionnel parcourt mais grâce aux trafics et à la malhonneteté.Il échoue dans sa mission auprès des tribus. »C’était un esprit aventureux, fort éveillé, connaissant bien les colonies anglaises, et appréciant tous les dangers de ce voisinage…et rendu de grands services par son initiative et sa connaissance des mœurs des sauvages »( La Nouvelle France.R .Guénin) Il échoue encore dans la création d’une colonie à Détroit ou existait déjà un fort. Les tribus se déchirent, il voit des complots partout. Un véritable réquisitoire est fait contre lui sur ses échecs, colonie, tribus, malhonnêteté, trafics…On le remet à l’épreuve en le nommant gouverneur de la pauvre terre de Louisiane, immensité de 21 Etats aujourd’hui. Il est étonné du vice et de la malhonnêteté qui y règne, comme quoi ?
Il est pourtant ingénieux et cherche en développant ses intérêts à faire fructifier la Louisiane en cherchant des richesses à découvrir. Avec Bienville, aventurier aussi et ancien officier des troupes de marine, ils iront à la Rivière Rouge , la rivière Ouachita, la vallée de l’Ohio et exploreront une partie du Texas.
Le Moyne de Bienville, frère de d’Iberville, était apprécié pour sa politique avec les tribus de la région de la Louisiane …Nous sommes en 1715 et les manières brutales Britanniques finissaient par nous servir directement dans nos amitiés avec eux. Un homme l’aide dans son entreprise, Louis Juchereau de Saint Denys.Ils fonderont ensemble le fort de Natchitoches sur la rivière Rouge et feront du trafic avec les indiens du Texas dont Louis connaissait toutes les langues. Comme le dira H.Servien, les Français sont différents mais il en ressort un point commun, c’est cette toile d’araignée d’alliances avec les tribus Indiennes, tissé au fil de l’histoire et des déplacements des aventuriers, explorateurs, trappeurs, colons et soldats. Partout les liens se créent et les Français marquent d’une durable amitié l’esprit des guerriers indiens.
« Car il ne faut pas oublier que de tous les étrangers qui ont abordé ou aborderont en Amérique, les Français sont les seuls à y avoir été invités par les autochtones » Jean Marc Soyez (spécial Canada, Historama, Juin 1984)
Frédéric WINKLER
Le sieur Charles Deschamps de Boishébert
« Un officier de grand zèle et fort méritant » le gouverneur Duquesne
« Car il ne faut pas oublier que de tous les étrangers qui ont abordé ou aborderont en Amérique, les Français sont les seuls à y avoir été invités par les autochtones » – Jean Marc Soyez (spécial Canada, Historama, Juin 1984)
Un homme commun dans sa maison normande de Raffetot qui s’éteignit à70 ans le 9 Janvier 1797…Ses voisins, savaient-ils que cet homme était la « bête noire, la hantise » des Britanniques en terre d’Acadie pendant de longues années…Robert Sauvageau dans son livre « L’Acadie » : « Boishébert demeure dans l’histoire l’homme qui, avec des moyens dérisoires, sut faire échec aux Anglais, après la chute de fort Beauséjour de 1755 à 1760.Pendant ces 5 longues années, il maintint la présence française contre des forces ennemies très supérieures sur un immense territoire qui s’étendait du haut de la rivière Saint-Jean jusqu’à la baie de Miramichi.Ce véritable miracle militaire, il l’a réussi grâce à son art consommé de la guérilla. Méthode de guerre « à l’indienne» dans laquelle Acadiens comme Canadiens étaient passés maîtres. Lui-même y avait été initié dés son plus jeune âge.N’avait-il pas participé, à 19 ans, à cette attaque contre Grand-Pré, conduite de nuit en plein hiver, qui reste un modèle du genre ? Opération où il s’était distingué et où il avait été blessé ? ».Les techniques de commandos permirent aux français de se maintenir « facilement » à 1 contre 10 contre les Britanniques. Ces guerres ou plutôt cette guerre de 100 ans que les Américains nomment « Guerres Franco-Indiennes » figurent comme une épopée à la façon du « Dernier des Mohicans » version Française…
Cet homme, comme tant d’autres héros oubliés était un maître de la « guerre furtive » technique étudié par l’Américain Patrick Malone (« The Skulking Way of War »), la guerre de partisan, de la guérilla, laisser le combat lorsque l’on est inférieur et se retirer en bon ordre et sans lâcheté. Fondre sur l’ennemi lorsque la proie est saisissable, infliger à l’ennemi de durs revers en l’obligeant à maintenir sur place d’énormes forces sur tout le territoire. A la fois partout et nulle part, un cauchemar pour les godons…Sortir de pièges, comme pendant l’affaire du Fort Saint George, capable aux sacrifices comme pour la destruction du Fort Saint-Jean, profiter et vaincre comme à Petitcodiac. Résister et tenir comme à Miramichi. Cette guerre si elle avait comprise des officiers venant de France et pratiqué méthodiquement contre l’Anglais, nous aurions surement vaincu, cela aurait changé la face de la Francophonie. Il suffit de lire les appréciations de Montcalm et Bougainville sur les actions de Boishébert et d’autres combattants non réglés militairement.
Relatons quelques souvenirs dont il nous reste quelques traces dans les archives anglaises, Journal de Montcalm ou ses propres mémoires publiées en 1763.Alors que les « godons » , nom donné depuis Jeanne d’Arc aux Anglais parce qu’ils jurent toujours en disant « my god » (mon Dieu), prennent 2 forts Français sans combat, les officiers s’étant rendus, Boishébert lui, se retire avec ses hommes, armes et bagages, en amont de la rivière St Jean. Ne pouvant faire face au surnombre des agresseurs et refusant de se rendre comme le firent les deux autres postes, il choisit la solution plus dure de se retirer afin de continuer la lutte et comble de tout, fait sauter le poste dit Fort La Tour , c’est déjà pour l’époque, une manière d’agir défiant les règles de guerre européennes. L’ennemi face à une telle réaction, n’ose se frotter à lui, car plus de fort pour se replier et un territoire hostile peuplé « de sauvages » alliés des Français.Quel dommage que les 2 autres officiers n’set eu pareille réaction pour regrouper leur force et frapper…Comme le dit Robert Sauvageau : « Boishébert sautait à pieds joints sur 45 ans de défense statique et de refus de guerre de manœuvre.Par là, il rejoignait la grande tradition de guerre de mouvement, à la Saint Castin , à la d’Iberville, à la Villebon , jadis promue par Frontenac.» Cet acte de stratégie exemplaire, réalisé par un jeune homme de 21 ans faisait parti de célèbres normands aux origines vikings. Le fait de choisir la guerre d’embuscade avec les conditions de vie difficile, misère, dureté, résistance, alors qu’il est plus facile de rendre les armes et d’aller en prison avec les lois de la guerre du XVIIIème siècle, est une révolution. Robert Sauvageau note dans son magnifique ouvrage « L’Acadie » en parlant des officiers Français s’étant rendus aux Anglais : « Tous les soldats, même courageux à d’autres égards, ne sont pas prêts à accepter la rude vie de guérillero à laquelle Charles de Boishébert se condamnait par sa décision de guerre à outrance contre l’envahisseur anglais…En 1755, il avait 28 ans. Un homme jeune accepte plus volontiers le risque et l’inconfort perpétuels. Lorsqu’ils avaient préféré la capitulation à la guérilla, Severcase avait 49 ans, et Villeray 54 ans. Circonstance qui permet de mieux comprendre leur attitude, sans l’excuser.» Comme St Castin, Français devenu chef des indiens Abénaquis et redoutable combattant, il est entré très tôt, à l’âge de 13 ans dans le monde des hommes. Né en 1727, il est en 1739 « cadet à l’aiguillette », enfant d’officier en apprentissage des armes. En 1742, il devient Sous-aide Major à la garnison de Québec.En 1743 envoyé en mission d’éclaireur sur les positions britanniques de Sarasto, entre le Fort St Frédéric et le lac Champlain, il permet l’attaque et la destruction du poste. Nommé Aide-Major à 16 ans, il participe à la reprise de Louisbourg et par la même occasion de la Nouvelle-Ecosse. De nouveau envoyé en éclaireur, il donne des renseignements précis sur la présence Anglaise à Port Lajoie. L’attaque Française qui s’en suit est terrible, commandée par Legardeur de Montesson, Charles y est présent avec des Canadiens, des Abénaquis et des Micmacs.Ils se ruent sur les Britanniques équipés de 2 bâtiments de guerre, 16 et 24 canons sur l’autre, belle victoire. En 1746, il est au siège d’Annapolis-Royal ou il décrit, dans ses mémoires la scène : «On campa devant la ville le 31 Septembre.A Annapolis-Royal, 1500 hommes de garnison, outre ceux qui étaient sur le Chester (54 canons) et les deux bateaux qui avaient tenté une descente à Port-Lajoie et qui étaient dans le port. Au total, 2000 hommes étaient assiégés ou bloqués par 600, car il n’en restait pas davantage à Ramezay. Le siège de la ville dura pendant 24 jours consécutifs, marqué par beaucoup de petits combats. Les manœuvres habiles de Ramezay trompèrent les assiégés sur les forces réelles des assiégeants et ils n’osèrent engager une action.» La flotte de La Jonquière ne pouvant venir pour prêter main forte, une retraite en ordre s’opéra et on attaqua Grand Pré au début de l’année 1747. Boishébert décrit la scène :
«250 Canadiens partirent de Baubassin pour reprendre le village. Ils apprirent d’un espion acadien que les Anglais étaient au nombre de 600 et retranchés dans les maisons. Chaque officier canadien attaqua la maison qu’il occupait l’année précédente. L’attaque eut lieu à 4 heures du matin. Boishébert avec 25 hommes attaqua un corps de garde défendu par 300 Anglais. Après un combat d’une heure, tous les Anglais furent tués. On comptait 4 blessés dans la troupe de Boishébert. Lui-même fut blessé d’une balle à travers son bonnet. A cause de la neige, de la nuit noire et du vent violent, le bruit de l’attaque ne fut point entendu de deux petits bâtiments qui étaient à la côte à une portée de fusil. Après la prise du corps de garde, Boishébert monta sur les vaisseaux et s’en empara. Il y avait 15 hommes d’équipage, et c’était le magasin de poudre et de vivre des Anglais.Au point du jour, les Anglais se rallièrent. Les Canadiens, en firent autant, et on se battit jusqu’à 3 heures après midi. L’ennemi, poussé vivement, s’était retiré sur une hauteur et retranché dans un moulin avec 4 pièces de canon, chargés à mitraille. Mais il n’avait pas de munition et il ne tarda pas à capituler : on lui permit de se retirer à Annapolis.Il ne manquait à une action si hardie et conduite avec tant de vigueur qu’un plus beau théâtre pour illustrer les officiers qui y participèrent… »
Juin 1747, il attaque avec le chevalier La Corne et des amérindiens, le Fort Clinton près de New-York.Ils étrillent durement une colonne britannique tentant une sortie. En automne 1747, à 21 ans, il est promu lieutenant lors d’un échange de prisonniers. Sous les ordres de La Galissonnière , en Avril 1749, il part vers la rivière St Jean, pour s’opposer aux Britanniques qui tentaient de s’y réinstaller. Boishébert commente : « Depuis Québec jusqu’à Horpank, habitation française, on marcha en raquettes sur la neige, traînant les vivres et les bagages avec des fatigues incroyables.Boishébert, suivant ses ordres, alla camper au bord de la rivière St Jean,et, dès que la navigation fut libre, il embarqua son détachement sur des chaloupes et se rendit au havre de Menacoche.Là, il arbora le pavillon de la France , ainsi qu’il lui était prescrit.».
Févier 1753, il est envoyé par Duquesne dans l’Ohio pour y construire un fort près du lac Erié, avec un magasin de ravitaillement à la baie de Quinté. En Avril de la même année, il est nommé commandant du Fort de la rivière aux Bœufs jusqu’en hiver.
1754, il retourne en Acadie comme commandant du Fort La Tour.
1755 , les godons prennent les Forts Beauséjour et Gaspareaux puis tombe en échec avec Boishébert au Fort La Tour , faisant exploser celui-ci comme cité plus haut…Il empêche les Anglais de contrôler la région…La guerre de partisan mené par Boishébert dans l’Acadie Occidentale permet aux Français de maintenir pendant 5 ans une pression sur les troupes d’occupation. Le projet d’éradication de la présence Française dans la région ne put être réalisé. Ecoutons encore Robert Sauvageau comparant la souffrance Acadienne à celle Vendéenne pendant la Révolution : « Il est frappant de comparer cette résistance acadienne qui dura 5 longues années, de 1755 à 1760 aux guerres de Vendée, 40 ans plus tard. Les colonnes punitives anglaises à travers l’Acadie évoquent irrésistiblement les « colonnes infernales » du général Turreau. Même férocité incroyable : pillages, incendies des maisons et d’église, viols, massacres, scalps d’Acadiens , meurtres de petits enfants (comme ceux de Joseph Godin), etc. De même, les Acadiens montrèrent une valeur combative égale à celle de leurs cousins poitevins de Vendée…» Boishébert maintint la pression sur les Britanniques, tout comme St Castin ou Joseph Broussard dit Beausoleil. Il couvre la rivière St Jean à la Baie Verte , partout et nulle part, se glissant d’un endroit à un autre, parfois à la barbe des Anglais avec une agilité calqué sur les Amérindiens ses amis, surgissant, frappant et disparaissant…
Chef militaire et administratif, regroupant réfugiés et familles, postant aux endroits stratégiques ses officiers et de petites troupes bigarrés composées d’Acadiens, d’Amérindiens et de quelques soldats perdus…Les différentes attaques du colonel Scott contre Boishébert se soldant par des échecs, les Britanniques redoubleront de brutalité sur le peuple Acadien insoumis. Puisque les Acadiens résistent, assimilons les aux « sauvages » et scalpons les, sur demande de Scott, Lawrence fit une proclamation : « 30 livres pour tout prisonnier indien, 25 pour toute prisonnière ou enfant, 25 pour tout scalp « indien », ou prétendu tel». Inutile de dire les conséquences de telles déclarations sur la soldatesque anglaise en mal d’argent…Un survivant, Pierre Suret témoigna de ce qu’il avait vu à Memramcook : « Le commandant de ce parti avait ordre de se saisir de tous les Acadiens dans cet endroit, de faire mourir incontinent tous ceux qui s’y trouveraient en état de porter les armes, de leur lever la chevelure…d’emmener tout le reste après avoir laissé au bout d’un piquet une lettre pour M. de Boishébert à peu près de ce style : « Vous avez commencé. Nous continuons sur ce même ton jusqu’à ce que vous vous retiriez de ce canton avec vos Sauvages. On dit chez vous aux sauvages qu’autant d’Anglais qu’ils tueront, ce sera autant d’échelons pour aller au Paradis. Nous ajoutons que c’en sera deux pour nos gens pour autant d’Acadiens qu’ils détruiront…» »
Le peuple Acadien subissait un véritable martyre, certains Acadiens, cette « vermine » selon Winslow, réussirent à s’échapper dans les forets en fuyant la déportation décrété en 1755, d’autres rejoignent les pôles de résistance disséminés dans toute l’acadie. La plupart meurt tués, déportés, certains de froid ou de faim…Note de l’intendant Bigot , le 5 Septembre 1755 : « Mr de Boishébert et le père Germain nous demandent des vivres, des effets, poudre, balles et plomb pour des familles qui se sont réfugiées dans les bois pour n’être pas prises…» Boishébert ne reste pas inactif, il est conscient de faire face seul, comme il dit : «Il parcourut ensuite la côte de Peckcodamon-Quanty et enleva avec 4 chaloupes une goélette anglaise, chargée de vivres et effets pour la garnison de Port-Royal. Elle était monté de 15 hommes et armée de 8 pierriers. On y fit prisonnier le commandant de l’artillerie de Beauséjour…» Plus loin dans son mémoire, il rajoute : «Là, employer à propos les menaces, les caresses et les stratagèmes…l’exemple de tout ce qui se faisait de grand en Canada. Représenter vivement les victoires sur le général Bradock à Chouaguen, au Fort Saint George, à Carillon et tant d’autres événements glorieux. Tantôt cacher habilement les entreprises, les forces et les succès de l’ennemi…»
Malgré les victoires des commandos Franco-indiens-indiens, le gouverneur n’osa pas reprendre l’Acadie aux Anglais, malgré les suppliques des 9000 âmes restantes en Acadie après qu’environ 9000 autres furent déportés. Une petite intervention aurait emporté le pays, vaudreuil hésitait et pourtant, il aurait pu sans risque, frapper un grand coup en hiver. Le Canada étant protégé naturellement par la neige et les glaces en hiver, les britanniques restant chez eux, alors que les franco-indiens étaient des spécialistes des opérations d’hiver. Ils en avaient depuis longtemps la maîtrise, combien de fois sous -30 à -40 degré étaient ils descendu terrasser les godons aux portes de Boston ? Selon de Bourbes écrivant, de Louisbourg à M de Surlaville : « Beaucoup de Canadiens se sont offerts à Mr de Vaudreuil pour aller cet hiver en parti…» Mais il semble que Vaudreuil n’apportait pas grande considération à l’Acadie, quel gâchis. Il pensait plutôt rapatrier les survivants des déportations au Canada afin d’en renforcer ses défenses. Quelle erreur de calcul, la formidable forteresse Française de Louisbourg ne pouvait vivre qu’avec la protection de l’arrière pays Acadien comme pour le Canada avec le tampon Acadien sur le continent. La Galissonnière l’avait compris comme La Jonquière, pas Vaudreuil…L’hiver 1756-57 sera terrible pour ces Acadiens et Amérindiens car ils manquaient de tout et le gouverneur n’enverra rien. Il échappe à une embuscade (Janv.1756) sans perte à Cocagne. Il fallut chercher à manger et plusieurs périrent de faim dans l’hiver glacé. «Tous les enfants moururent…On se nourrit ensuite des peaux de castor qu’on put trouver. On mangea jusqu’au souliers faits de peaux de chevreuil» dit Boishébert.Tout cela jusqu’au 16 Mai ou arriva un navire de provision. 17 Mars 1756 il est capitaine et en 1757 son QG est à la rivière Miramichi, lieu de refuge et de résistance à l’oppresseur britannique…
Voilà le triste sort d’un peuple abandonné par la métropole mais jamais vaincu, attaché à la France et ses traditions. L’époque dite des « Lumières » voyait en France certains philosophes comme Voltaire détourner l’opinion pour influencer le Roi en résumant l’Amérique à « Quelques arpents de neige ». Il est vrai que Voltaire avait des intérêts aux Antilles avec la canne à sucre et qu’il fallait tout faire pour en récolter les fruits.9 Septembre 1758, attaque du Fort Saint George, les godons tendent une embuscade qui se retourne contre eux, écoutons Boishébert : les Anglais « furent battus avec perte de 46 hommes et de 22 prisonniers.MM de Boucherville, Cery de Richerville, et Saint-Simon…se distinguèrent beaucoup. Le dernier, quoique blessé au bras, ne contribua pas peu au succès de cette rencontre…» Vaudreuil rajouta le 18 octobre 1758 : « Ce détachement anglais attira M de Boishébert dans une embuscade. Mais il fonça avec tant de vivacité sur l’ennemi qu’il tua le commandant, plusieurs autre Anglais…»
Quel beau sujet de roman ou de film que le sieur de Boishébert…
Frédéric WINKLER
Pierre Le Moyne d’Iberville et ses frères
Anobli en 1668, troisième de 14 enfants d’un marchand de Montréal, il est intéressant de noter ici l’ascension sociale d’une famille qui passe du commerce au métier des armes. Ce petit détail pour les histrions républicains parlant d’un blocage de la Monarchie dans la caste noble. Pierre est instruit, éduqué, rusé et intrépide. Il resta quelques temps chez les Iroquois et en apprit la langue et servit aussi pour les négociations. Sa bravoure impressionna les Iroquois qui lui laissèrent la vie après l’avoir capturé et l’adoptèrent en faisant de lui leur représentant aupres du gouverneur.Ami de Dollard des Ormeaux dont il devait partager la tragique fin s’il n’avait été prit par ses travaux dans son domaine, il se maria et eut 13 enfants.Ce nom illustre les familles au service du Roi donc de la France : St. Helene bléssé mortellement au siège de Quebec, De Chateauguay tué lors de la prise du fort Bourbon en1694, Bienville tué d’une balle dans la poitrine dans l’attaque d’une maison défendue par les Iroquois.
Il commença à se faire connaître, lors d’une expédition en 1686 avec ses 2 frères Jacques et Paul, visant à déloger les Britannique de la Baie d’Hudson. Cette petite troupe composée de 70 Canadiens (miliciens/trappeurs) et de 30 soldats des troupes de Marine attaqua le Fort Moose sur l’ile Hayes. Ils passèrent dans les courants et rapides de la rivière Outaouais, le lac Temiscamingue, les rivières Abitibi et Monsioni.L’événement est intéressant car il révèle la personnalité de Pierre qui se trouva, lors de l’assaut, seul, pistolet dans une main et épée dans l’autre, entouré de 17 Anglais, qu’il captura avec rage et témérité…Saint Hélène s’illustra aussi en prenant le flanc gauche du fort avec 18 hommes, en parlementant la réédition il aperçut un anglais pointant un canon sur eux, il le foudroya d’une balle entre les deux yeux. Il sauva du même coup son frère et ses hommes. En peu de temps le sud de la baie devint française, il prit le poste de commandant du Fort Moose, rebaptisé St Louis.
Il se dirigea à 10 jours de marche vers le poste de traite de Rupert, St Hélène en éclaireur, attaque le fort Rupert qui sera rebaptisé St Charles pendant que le 3 Juillet en canoë avec 13 hommes d’Iberville prend d’assaut le vaisseau « Le Craven » ancré près du fort.Le troisième Albany(Quichichouane) tomba dans la foulée.
En 1687, voulant quitter le fort avec sa cargaison de fourrure, il se trouve face à 2 navires de 3 mats Anglais d’au moins 24 canons chacun sur la rivière Albany, coincés par les glaces. Le frère de D’Iberville, De Maricourt harcela durant tout l’hiver avec un petit groupe de commando canadien les 85 Anglais essayant de se ravitailler sans succès. Le scorbut atteignit les marins anglais aux abois, d’Iberville en flibustier se saisit de l’occasion et fit prisonnier tout ce petit monde. Il en prit un autre dans les jours qui suivirent et arriva à Québec avec 3 vaisseaux et 85 prisonniers capturés par 16 Canadiens.
Il envoi trois hommes en reconnaissance vers un bâtiment Anglais prit dans les glaces près de l’ile Charleston.Ils se font prendre, sauf un qui s’échappe. Le printemps arrive, le commandant du navire se noie, ne reste que 6 hommes. Ils délivrent un canadien pour les aider à manœuvrer qui, profitant du fait que les Anglais étaient à la voilure, se saisit d’une hache, tue les deux marins près de lui, libère son ami et retrouvent d’Iberville venu les secourir sur le chemin…
Février 1689, il continu de faire parler de lui. Trois détachements que l’on peut qualifier de commandos décident d’attaquer les établissements Anglais du nord de la Nouvelle-Angleterre. Un groupe est aux ordres de son frère Le Moyne de St Hélène, l’autre à Nicolas d’Ailleboust, officier aguerri et le troisième sous ses ordres, le tout composé de 114 Canadiens et 96 Amérindiens.Partant en avant les coureurs des bois avec les Abénaquis et des Mahicans ou Loups. Il faut se figurer la température qu’il fait en hiver au Canada, lors de ses attaques et la distance parcourue avec les vêtements de l’époque…La corpulence de ses hommes de Louis XIV, traversant l’Amérique en canoë, à pied ou en raquettes, avec des mousquets à un coup, poignards et tomahawk… On laisse les canoës au lac Champlain puis on chausse les raquettes, on ne fait pas de feu, gourdes d’eau de vie et lard froid..Ils arrivent en pleine nuit du 18 Février à Corlaer aujourd’hui Schenectady, état de New-York et passent à l’attaque. Ils hurlent des cris de guerre comme les iroquois, lors du massacre de la colonie Française de Lachine, l’année précédente. L’établissement fut pillé et brûlé. Ils repartirent avec 50 chevaux chargés de butin et 25 prisonniers à Montréal. « Grâce à de semblables coups de main où les Canadiens se montrèrent plus résistants que les meilleurs guerriers iroquois et parfois plus cruels que leurs ennemis, la colonie put tenir sans aide venue de France, pendant plus de 3 générations » (L’Amérique Française d’Henri Servien)
En 1690, 80 hommes et 3 vaisseaux, il attaque le Fort New Severn sur la baie d’Hudson, sud-est de fort York.
En 1691, après la chute de Port Royal, il fallut faire face à Québec à une attaque Anglaise de 32 navires dont 4 de 3 ponts bien armés et 2000 miliciens, qui fut repoussée…Frontenac n’était pas homme à se laisser impressionner et répondit aux anglais : « Je n’ai point de réponse à faire à votre général que par la bouche de mes canons et à coups de fusil » St Hélène et son frère ainé de Longueil blessé au bras, décimèrent avec 200 volontaires le débarquement britannique aux ordres du major Walley sur les rives proches.Maricourt arriva dans la ville et s’occupa d’une partie de l’artillerie…Deux jours de combat, des cris de joie quand un boulet fracassa le pavillon Anglais du vaisseau amiral. Le 21 Octobre, variole, blessés et moral au plus bas, l’escadre anglaise partit, Québec était sauvée…Maricourt fut nommé capitaine, officier de marine chez les Iroquois, qui l’adoptèrent comme fils, les chefs Iroquois Onontagués lui donnèrent le nom de Taouestaouis(le petit oiseau toujours en mouvement) en le nommant ambassadeur. Cela préparait la « Grande Paix de 1701 » .Son frère Longueil lui succèdera plus tard dans ses fonctions auprès des Iroquois.Pierre devint capitaine de frégate.Il était souvent accompagné du corsaire Denys de Bonaventure…
En 1692, il capture 3 navires Anglais.
En 1694, prise du Fort York de la baie d’Hudson et rebaptisé Fort Bourbon avec 120 Canadiens et quelques indiens du Sault St Louis.Opération éffectuée par les 3 frères, d’Iberville commandant la Salamandre , Sérigny le Poli avec Châteauguay comme enseigne qui mourut lors de l’attaque…
En 1696, le 14 Juillet, voilà une date plus intéressante à fêter, il court aider Joseph Robineau de Villebon, gouverneur d’Acadie au prise avec 3 vaisseaux britanniques. Il bondit avec ses frégates, capture le Newport de 24 canons pendant que les deux autres s’enfuient.
Il en profite pour attaquer le Fort William Henry sur la frontière entre Acadie et Nouvelle-Angleterre.Avec le corsaire Baptiste et Bonaventure embarquant Villebon et 50 guerriers, il est aidé du baron de St Castin, chef Abénaquis arrivé avec 240 guerriers.Il le détruit et renvoi les prisonniers à Boston.
Hiver 1696/97, Il va à Terre-Neuve, accompagné du gouverneur Brouillan et de 80 volontaires. « Pendant neuf jours, les Canadiens marchèrent dans les bois épais, sur un sol détrempé, brisant la glace à chaque instant sous leurs pas, traversèrent des rivières et des marécages avec de l’eau jusqu’à mi-corps, et couchèrent sur la dure. »( La Nouvelle France ) Ils prennent St John’s et 36 établissements anglais, 200000 quintaux de morue et « …pendant deux mois parcoururent le pays, enlevant les points fortifiés, brûlant les établissements, répandant la terreur parmi les habitants. Ils tuèrent deux cents ennemis qui se défendaient les armes à la main, et firent plus de sept cents prisonniers… »( La Nouvelle France ) Les groupes de « Canadiens, raquettes aux pieds, allèrent par petits détachements dans les hameaux isolés où étaient installées les pêcheries qu’ils incendièrent et pillèrent comme ils avaient fait à Saint-Jean »(L’Amérique Française »d’Henri Servien).
Avant de pouvoir finir, il est demandé à la baie d’Hudson où, sur le chemin, séparé du reste de la flotte, à bord du Pelican de 44 canons et 150 combattants(40 malades du scorbut), il trouve en face de lui le Hampshire, 250 hommes et 56 canons, le Dering de 36 et le Hudson’s Bay de 32.Pas question de fuir dans la Royale , il manœuvre comme un génie, se range en bataille et attaque comme un loup de mer. Il désempare ses officiers en donnant ses ordres défiants les règles de manœuvre et plaçant son navire au vent. Ecoutons Henri Servien : « Le Moyne cria des ordres rapides : Armez tribord ! Les chefs de pièces à ,démâter, à couler pour le second pont ! La barre dessous, bordez les écoutes !
La brusque manœuvre contraignit la conserve du Hampshire à s’écarter ;les deux vaisseaux à portée l’un de l’autre lâchèrent leurs formidables bordées en même temps :45 grosses pièces tonnèrent de concert. Une partie des boulets anglais passèrent en ronflant au dessus du pont français. Dans la fumée et les cris, la voix d’Iberville dominait.
Armez bâbord ! Chefs de pièces à couler ! Feu de bordée !
Le Hudson’s Bay n’avait pas eu le temps de tirer. Comme pour le Hampshire les boulets du Pelican lui causèrent de graves dégâts. Il préféra virer de bord et s’écarta. Au deuxième passage, encore noyées dans des bancs d’épaisse fumée, les coques de chêne éclatèrent en échardes meurtrières ». Bienville fut grièvement bléssé au commandement d’une des batteries d’artillerie. D’Iberville veut en finir et positionna son navire bord à bord en envoyant une bordée sur la ligne de flottaison du Hampshire. Celui-ci la coque crevée sombra avec tout son équipage sous les hourras des Français victorieux. Le Hudson’s Bay stupéfait devant tant de hardiesse se rendit sans combattre. Le Pelican durement éprouvé lors de l’accrochage, par des avaries multiples, laissa le During s’enfuir…
L’histoire enseigné dans nos écoles a oublié tout ces héros de jadis et comme je le disais à une assemblée de jeunes lors de mes repas, c’est les enterrer une seconde fois que de ne plus en parler…La baie d’Hudson est maintenant Française. Mais la campagne n’était pas terminée : « sans vivres, sans effets de rechange, d’Iberville prit le parti désespéré d’attaquer le fort Bourbon et, de l’enlever d’assaut. Mieux valait périr dans un combat acharné que de succomber au froid et à la faim sur ces plages glacées. Il allait engager l’action lorsque le Palmier, le Wesp et le Profond parurent à l’embouchure de la rivière. C’était le salut, et un renfort suffisant pour réduire bientôt à merci la garnison du fort déjà démoralisée par la destruction de la flotte de secours. Aussitôt les approches furent faites et les batteries établies. Quarante huit heures d’un violent bombardement déterminèrent les Anglais à capituler pour éviter un assaut… »
La gloire de d’Iberville est alors, connu de tout le Canada. Habile et clairvoyant, il avait écrit sur la vallée du Mississippi : « Si la France , ne se saisit pas de cette partie de l’Amérique, qui est la plus belle, pour avoir une colonie assez forte pour résister à celle qu’à l’Angleterre dans la partie de l’est depuis l’Acadie jusqu’à la Caroline , la colonie anglais, qui devient très considérable, s’augmentera de manière que dans moins de cent années elle sera assez forte pour se saisir de toute l’Amérique du Nord et en chasser les autres nations ».On lui demande de reconnaitre un endroit du Mississipi pour y établir un fort. A l’époque, ce n’était guère aisé, car la région, très humide et marécageuse était difficile, fièvres, bois pourrissant, insectes…Il fait construire le Fort Maurepas dans la baie de Biloxi aujourd’hui Océan Springs pour contrôler les mouvements dans la région. Il est le premier Canadien à recevoir, la Croix de St Louis, haute distinction militaire des rois de France, en demandant par la même occasion, une colonisation rapide de la Louisiane.
En 1700, il construit le Fort Mississipi, plus au nord en établissant de chaleureuses relations avec les tribus environnantes.
En 1701, c’est l’établissement à Mobile, du Fort St Louis. D’Iberville, sans relâche, entretient prioritairement les bonnes relations avec nos alliés autochtones. Pour cela, il favorise l’envoi de missionnaires et l’établissement de « coureurs des bois » qui vivent et se marient avec les indiennes. C’est aussi l’époque où un édit de Richelieu stipulait, que tout sujet amérindien christianisé, pouvait se considérer comme sujet du Roi de France, humanisme inconcevable pour un sujet britannique puritain. Il faut signaler que les Dauphins de France grandissaient souvent avec comme camarade de jeu, un ou deux enfants amérindiens, confiés par leur père, souvent chef de tribu…
D’Iberville commence à être fatigué, plusieurs crises de malaria l’affaiblissent mais il reste à l’affut pour empêcher toute expansion britannique à l’ouest des Appalaches.
En 1706, il arrive de France avec 12 vaisseaux et terrasse les godons aux Antilles. St Christopher est ravagé sans merci. Nevis et Charlestown capitules en Guadeloupe et 24 vaisseaux Anglais sont pris. Il se dirige sur Cuba à la Havane et s’éteint…Voilà le destin d’un grand homme que l’on pourrait largement citer aux jeunes générations en remplacement de quelques stars pailletées à grand frais, sans dimension…Il est vrai que les peuples ont les gouvernements qu’ils mérites et par symétrie, les idoles que l’on peut…
Frédéric WINKLER
Québec 400 ans, je me souviens… Madeleine de Verchères
Pourquoi ne parlerions-nous que des hommes alors que notre histoire démontre que le sang Français générait des héros dans les deux sexes. Jeanne d’Arc, Jeanne Hachette, Geneviève et bien d’autres encore. Nous parlerons aujourd’hui de Madeleine de Verchères. Nous sommes sous Louis XIV et le gouverneur est Mr de Frontenac. Les conflits sur cette terre d’Amérique sont d’une cruauté inouïe malgré cette période de guerre en dentelle. La guerre fait rage avec les Iroquois. Le fort de Verchères est à 25 km de Montréal où Madame de Verchères est allée. Monsieur de Verchères lui, est à Québec. Madeleine, âgée de 14 ans est restée avec ses 2 frères Louis et Charles au fort avec le domestique La Violette , 2 soldats La Bonté et Galbet et quelques femmes…
Elle étend le linge avec les femmes en contrebas, quand tout à coup des cris de terreur annoncent l’arrivée des Iroquois. Il faut bien comprendre que l’arrivée de ceux-ci créé la panique et c’est une fuite éperdue vers le Fort où quelques femmes malheureusement ne pourront parvenir…
On ferme les portes pour organiser la résistance quand Madeleine s’aperçoit que les deux soldats sont résolu à s’abandonner l’un à la mort et l’autre à l’explosion du dépôt de munition…Elle décide de prendre les choses en main en les secouant, prend un mousquet en main et donne les ordres pour la défense de la place.Elle avait déjà été témoin de la résistance de sa mère, Marie Perrot à plusieurs attaques Iroquoises, bon sang ne saurait mentir…
Les deux soldats, interloqués obéissent, les femmes se ressaisissent et tout le monde fait face aux rempart. Un combat terrible s’engage contre les cruels Iroquois tandis que les blessés dans le fort, rechargent les armes. Pendant cette lutte sans merci, Madeleine aperçoit une famille accourant en se frayant un chemin dans la horde sauvage. Elle fait ouvrir les portes et couvre avec La Violette d’un feu nourrit leur arrivée. C’est Pierre Fontaine, le coureur des bois avec sa femme et ses enfants qui réussissent à pénétrer dans le fort. Les Iroquois en rage redoublent leur attaque mais heureusement pour les défenseurs, le Fort tient bon.
Les jours passent, les nuits avec les tours de garde, entrecoupés de coups de canon pour tenter d’avertir des secours sur la détresse du Fort et impressionner les Iroquois. La fatigue, les blessés, la nourriture et l’eau commencent à manquer, puis une tempête de neige s’abat…
Imaginons un instant ce que devait ressentir ces héros du temps du Roi soleil. Le moral n’est pas bon mais Madeleine encourage son petit monde à la résistance. Elle explique avec une maturité précoce, que le fait de rendre difficile la prise de la moindre position Française, fera craindre aux Iroquois tout autre attaque contre la Nouvelle France. Pendant plus d’une semaine le Fort tient bon, quand les renforts arrivent enfin. Ils trouvent Madeleine toujours au guet, prête au combat. Elle remet les armes aux mains de La Monerie qui dans la grâce qui caractérise les temps classiques, lui répond que jamais main plus digne les avaient tenus. Un Iroquois prisonnier révélera une tentative d’attaque de nuit échoué à cause de l’attentive surveillance de madeleine aux remparts.
Louis XIV entendit relater les faits de Madeleine et demanda au gouverneur M. de Frontenac de la récompenser. Celle-ci ne réclama qu’une modeste pension de veuve d’officier, pendant que son nom traversait de bouche à oreille les récits héroïques de la Nouvelle France …Elle épousa Pierre Thomas Tarieu de la Naudière, sieur de Pérade, brave officier du temps et mourut en 1747, avant de voir disparaître les Lys en terre d’Amérique. Plus tard dans la défense de Québec en 1759, nous retrouverons Tarieu de La Naudière , fils de Madeleine, officier des troupes de marine, beau frère de Boishébert, héros Acadien. Celui-ci se fera remarquer dans sa proposition intelligente de construction de petits radeaux, porteurs de canons pour faire face à une intrusion Britannique sur les eaux du Saint Laurent…
Frédéric WINKLER
Le sacrifice d’Adam Dollard
Nous sommes en 1660, sous Louis XIV. La situation en Nouvelle-France est dramatique : une population d’à peine 1 500 habitants se trouve confrontée à une colonisation britannique beaucoup plus dense, ainsi qu’aux menaces incessantes des raids iroquois. Ceux-ci empêchent tout commerce et les marchands menacent de fuir ; la colonie risque de disparaître. Face aux Iroquois Adam Dollard, sieur des Ormeaux, s’est vu confier une terre à Ville-Marie par M. de Maisonneuve.Cela fait deux ans qu’il est arrivé de France ; il a vingt-cinq ans, il est officier de la petite garnison. Il est du sang dont on fait les héros, et la France d’alors en prodiguait beaucoup… Il emprunte un peu d’argent en signant « Dollard » pour équiper son expédition, puis il part. Il est suivi par seize jeunes compagnons de dixsept à vingt-trois ans, par quarante guerriers hurons, et par le grand chef algonquin Annaotaha avec quatre guerriers. Il veut attaquer les bandes d’Iroquois qui passent à la fin de l’hiver sur la rivière des Outaouais, chargés de fourrures destinées aux Anglais. Et ce à Long-Sault, un lieu stratégique qui, libéré, permettrait aux trappeurs et aux alliés amérindiens de venir vendre leurs fourrures en Nouvelle-France.
Eugène Guénin relate les combats dans son magnifique ouvrage La Nouvelle-France : « Des Hurons, franchissant la palissade, allaient au milieu du feu couper la tête d’un chef qu’une balle avait tué et la plantaient sur un des pieux de l’enceinte. » Un instant on se prend à espérer, quand six cents autres Iroquois arrivent. La panique gagne ; quelques Hurons s’enfuient mais sont vite massacrés. Au fil des jours, les denrées diminuent, mais la fuite est impossible. L’ingénieux Dollard tente de lancer un tonneau de poudre sur les assiégeants ; une erreur de manoeuvre le détourne vers le fortin et c’est l’horreur pour les Français, leurs flèches pouvaient être lancées avant le rechargement d’une arquebuse… Les Iroquois en possédaient depuis longtemps, fournies par les Anglo-Hollandais, alors que la France reculait toujours la distribution, consciente des génocides perpétrés entre eux par les Amérindiens. L’enfer du fortin la première, puis la seconde et la troisième vague d’assaut sont repoussées. Français, Algonquins et Hurons sont « au coude à coude » et résistent face aux « diables rouges ».
Le sacrifice de Dollard des Ormeaux et de ses compagnons aura sauvé la toute jeune ville de Montréal d’une extermination programmée : lourdement étrillés par la petite résistance courageuse, les Iroquois préfèrent rentrer chez eux. Trappeurs et Amérindiens reprennent le commerce des fourrures. Radisson et Des Groseillers, de célèbres explorateurs, se rendent à Québec avec soixante canots remplis de fourrures…
Frédéric WINKLER