Le sacrifice d’Adam Dollard

DollardHéros de la bataille de Long-Sault, il fait le sacrifice de sa vie pour sauver la colonie de Ville-Marie en 1660.
Nous sommes en 1660, sous Louis XIV. La situation en Nouvelle-France est dramatique : une population d’à peine 1 500 habitants se trouve confrontée à une colonisation britannique beaucoup plus dense, ainsi qu’aux menaces incessantes des raids iroquois. Ceux-ci empêchent tout commerce et les marchands menacent de fuir ; la colonie risque de disparaître. Face aux Iroquois Adam Dollard, sieur des Ormeaux, s’est vu confier une terre à Ville-Marie par M. de Maisonneuve.Cela fait deux ans qu’il est arrivé de France ; il a vingt-cinq ans, il est officier de la petite garnison. Il est du sang dont on fait les héros, et la France d’alors en prodiguait beaucoup… Il emprunte un peu d’argent en signant « Dollard » pour équiper son expédition, puis il part. Il est suivi par seize jeunes compagnons de dixsept à vingt-trois ans, par quarante guerriers hurons, et par le grand chef algonquin Annaotaha avec quatre guerriers. Il veut attaquer les bandes d’Iroquois qui passent à la fin de l’hiver sur la rivière des Outaouais, chargés de fourrures destinées aux Anglais. Et ce à Long-Sault, un lieu stratégique qui, libéré, permettrait aux trappeurs et aux alliés amérindiens de venir vendre leurs fourrures en Nouvelle-France.
Ils surprennent des Iroquois qu’ils mettent en fuite à l’île Saint-Paul, aujourd’hui l’île des Soeurs. Le 1er mai, ils arrangent comme ils peuvent un vieux fortin algonquin à Long-Sault mais aperçoivent déjà les Iroquois. Non pas une bande de chasseurs, mais une masse de trois cents guerriers bien armés, qui arrivent sur le « sentier de la guerre » pour exterminer ce qu’il reste de la colonie française. L’affrontement est terrible. À l’époque, plusi

Eugène Guénin relate les combats dans son magnifique ouvrage La Nouvelle-France : « Des Hurons, franchissant la palissade, allaient au milieu du feu couper la tête d’un chef qu’une balle avait tué et la plantaient sur un des pieux de l’enceinte. » Un instant on se prend à espérer, quand six cents autres Iroquois arrivent. La panique gagne ; quelques Hurons s’enfuient mais sont vite massacrés. Au fil des jours, les denrées diminuent, mais la fuite est impossible. L’ingénieux Dollard tente de lancer un tonneau de poudre sur les assiégeants ; une erreur de manoeuvre le détourne vers le fortin et c’est l’horreur pour les Français, leurs flèches pouvaient être lancées avant le rechargement d’une arquebuse… Les Iroquois en possédaient depuis longtemps, fournies par les Anglo-Hollandais, alors que la France reculait toujours la distribution, consciente des génocides perpétrés entre eux par les Amérindiens. L’enfer du fortin la première, puis la seconde et la troisième vague d’assaut sont repoussées. Français, Algonquins et Hurons sont « au coude à coude » et résistent face aux « diables rouges ».

dont plusieurs meurent. Les Iroquois en profitent ; un terrible corps à corps s’ensuit selon le témoignage d’un survivant huron.Quand les Iroquois pénètrent dans la modeste position, ils rencontrent cinq Français et quatre Hurons qui défendent chèrement leur vie. Un Français gravement blessé est torturé à mort sur place, tandis que les quatre autres sont partagés entre Onneiouts, Agniers et Onontagués, constituant trois des cinq nations Iroquoises d’Amérique ; ils finissent torturés et sans doute dévorés comme le veut la coutume…
Le sacrifice de Dollard des Ormeaux et de ses compagnons aura sauvé la toute jeune ville de Montréal d’une extermination programmée : lourdement étrillés par la petite résistance courageuse, les Iroquois préfèrent rentrer chez eux. Trappeurs et Amérindiens reprennent le commerce des fourrures. Radisson et Des Groseillers, de célèbres explorateurs, se rendent à Québec avec soixante canots remplis de fourrures…
Qu’on ne les oublie pas.

Frédéric WINKLER

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