Français souviens-toi…

« Souviens-toi que tu dois mourir… Et paraître devant ton créateur… » En chevalerie, tout est beau, aventure, passion et joie… « A l’heure où le mal a souvent droit de cité parmi les hommes, et jusque dans les plus hautes institutions, le réveil de la vocation chevaleresque est une urgence, à laquelle le ciel n’a jamais tardé à répondre. » P. Philippe-Emmanuel Rausis

Il s’agit donc de trouver voir de retrouver l’esprit qui animait les hommes épris de libertés et d’indépendance qui, sous l’ombre du chêne royal se réunissaient, organisaient la vie de la cité et de leurs communautés, légiféraient, créaient les lois, les perfectionnaient. Que ce soit pour l’autonomie des métiers, des familles, des villages et villes, par l’enchevêtrement des représentations librement désignés jusqu’aux conseils du roi. Cet amalgame naturel, cette juxtaposition de ce qu’Aristote considérait comme l’équilibre des pouvoirs : démocratie dans la commune, aristocratie dans la province, couronnées par la monarchie dans l’Etat. Il ne s’agit pas de revenir dans le temps passé mais de recréer l’esprit qui permit aux hommes de s’élever, par cet empirisme productif, riche que fut notre histoire capétienne, où « peuple et roi » étaient de droit divin, disait Marcel Jullian, vieil ami disparu…
« Moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » (Mt 28,20)

Nous allons souvent chercher ailleurs ce que nous avons oublié chez nous. On découvre des cultures, voir des religions exotiques autres, afin de trouver une voie spirituelle qui, chez nous fait défaut mais qui pourtant fut jadis riche et prometteuse. Il ne s’agit pas de parler d’une bigoterie mal placée, ni d’une interprétation catholique de façade, trop souvent actuelle aujourd’hui, qui ressemble quelquefois plus à du puritanisme qu’à la foi de nos ancêtres.
Malheureusement, certains se comportent, par l’air du temps, en donneur de leçons. Ils paradent devant l’Eglise comme les bourgeois du XIXe, strictes et hypocrite bon teint, machisme mal placé, femmes objets avec un ou deux enfants bien sages, tout cela sentant un peu la naphtaline aurait dit Bernanos. C’est aussi, ceux qui redécouvrent la religion en réaction à d’autres, allant chercher la croix de la grand-mère perdue dans une boite au grenier, afin de se créer une identité, depuis longtemps perdue. Tout cela sans grande conviction et parfaitement éloigné de ce que pouvait donner une foi vécue dans les temps anciens…
« Melissent la sereur le conte de Triple qui mout estoit sage pucele et de grant biaute » (Guillaume de Tyr)


Les temps médiévaux de profonde croyance étaient autres, vécues pleinement dans les engagements, de la foi aux rapports d’hommes, ce que l’on nommait la féodalité. Il ne reste qu’à redécouvrir cette voie oubliée, ce chemin dentelé de nos espérances enfouies. Il s’agit de s’élever en se détournant de l’égoïsme. Bien sûr, cela reste contraire à notre époque, tourné vers son bien être personnel, pour satisfaire sa vanité, sa vénalité. Cette quête dans l’accomplissement de l’être « chevaleresque » est source d’une inépuisable fécondité, René Guenon disait : « Toute action qui ne procède pas de la connaissance manque de principe et n’est plus qu’une vaine agitation ».

Tout rayonnement humain va de pair avec la richesse intérieure et non extérieure, illusoire, superficielle et vaine. On est efficace, convaincant, rassembleur, que lorsque nous sommes épanouie en nous. Bref pour agir, il faut être. Un être dans le doute ne peut avancer, il est ébranlé par les forces destructrices, qui le minent. Lorsque le matérialisme corrompt les nations et les hommes, s’ouvre la voie de la turpitude, lâcheté, faiblesse, aveuglement, égoïsme pour finalement arriver au renoncement : « Hommes, tueurs de Dieux, les temps ne sont pas loin. Où, sur un tas d’or vautrés dans quelque coin. Ayant rangé le sol nourricier jusqu’aux roches. Ne sachant faire rien ni des jours ni des nuits. Noyés dans le néant des suprêmes ennuis. Vous mourrez bêtement en emplissant vos poches » (Leconte de Lisle).

L’éthique des chevaliers par la lumière guidée, entraînera : courage, fidélité, service comme loyauté et honneur. La société mercantile entraîne l’homme vers un activisme forcené et une agitation stérile : « Mais où se joue cet éternel présent qui nous émeut dans le mythe ? Nulle part ailleurs qu’en l’homme, qui doit sans cesse, nouvel Héraclès et prince des origine, prendre position sur ces cimes intérieures pour rejeter aux abîmes les puissances aveugles qui s’agitent en lui, confirmant ainsi le monde de lumière, qui est en même temps celui de la liberté et du droit » Ernst Jünger (1953).

Nous devons tout faire pour vivre la réalité de nos pensées, au risque de finir par penser comme malheureusement on aura vécu ! : « La vie n’est que ce que l’on en fait, c’est un bien perdu, quand on ne l’a pas vécu comme on l’aurait voulu » disait Imonescu. Ce sont les hommes qui font l’histoire (Bernanos), retrouvons par empirisme, la sagesse des anciens, cet arbre de vie, cette lumière de la spiritualité des temps médiévaux. Retrouver ce calme, cette sérénité et la contemplation de l’art roman ou gothique, se retrouver en communication avec soi-même. Ecouter les bruits oubliés, l’eau sur les cailloux des sources au bruissement du vent dans les branches et feuilles des arbres. Prendre son temps, hors des montres Humer le matin cette odeur de fougères dans les sous-bois, quand la nuit commence à disparaître et que le jour se lève. Percevoir au loin dans les champs cette brume formant des nuages perdus au-dessus des herbes. Peut-être même imaginer encore quelques trolls où elfes jouant encore dans la brume du matin présente au-dessus des blés, où parcourant ces bois dans les profondeurs des forêts françaises à l’image de Brocéliande. Puis, observer le ciel dans le bal des nuages et la clarté du jour, s’appuyer sur le tronc d’un chêne. Sentir les rythmes de son cœur, battre comme le fluide de son sang, sève de la vie, au lieu de sombrer dans la soumission à l’objet, des passions et appétits momentanés :

« Que sert à l’homme de gagner le monde s’il vient à perdre son âme ? C’est la première question à poser à l’homme moderne qui n’a trouvé au bout de ses conquêtes que le désarroi, la terreur de lui-même et de sa vaine puissance, et le désespoir. C’est la question intrépide, sans peur et sans reproche, qui dressait saint Loup devant Troyes et sainte Geneviève sauvant Paris du flot des barbares, parce que contre celui dont l’âme est fortifiée par cette question et cette affirmation vécue, contre celui dont l’âme est pacifiée à jamais par ce choix sans retour et cette adhésion tranquille à l’ordre des choses divines et humaines, aucune arme n’a plus de pouvoir. La Chevalerie était d’abord le refus de gagner le monde au prix de son âme, d’emporter la victoire au mépris des lois de Dieu, d’amasser des trésors sur la terre où la rouille et les vers rongent, et où les voleurs fouillent et dépouillent, le refus de bâtir la maison sur le sable au moment où soufflent les vents, où la pluie descend, où les fleuves débordent. La Charte de la Chevalerie n’avait pas besoin d’être écrite, la Charte de la Chevalerie c’est le Sermon sur la Montagne » (Jean Louis Lagor, Une autre Chevalerie naîtra)

Frédéric Winkler (L’Ethique de la Reconquete, à suivre…)