Propositions pour Alstom et combat royaliste :

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Dimanche dernier se tenait le banquet de rentrée du Groupe d’Action Royaliste, banquet qui avait pour thème « Nos raisons pour la Monarchie » : un titre qui ouvrait la voie à de nombreux discours (il y en eut six en tout), dont celui que je reproduis ci-dessous (sous la forme d’un résumé en deux parties) sur « l’affaire Alstom », affaire qui montre que la République n’est plus capable (si elle l’a jamais été…) de s’imposer aux féodalités économiques, à cette « Fortune anonyme et vagabonde » souvent cynique et avide, telle que la dénonce le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz. D’où l’urgence, aussi, de poser la question des institutions et de l’esprit de l’Etat, pour protéger au mieux ce qui doit l’être et préparer l’avenir « que tout esprit bien né souhaite à sa patrie », comme l’exprimait Maurras.

1ère partie : Constat de l’impuissance de la République.

L’affaire Alstom de Belfort nous rappelle que nous sommes dans une ère d’économie sauvage (que l’on peut appeler mondialisation pour faire simple), et qui se définit par la libre concurrence internationale sans limites, mais, qui est en fait une sorte de guerre économique de tous contre tous, dominée par quelques grandes multinationales milliardaires (comme on le voit avec le rachat de Monsanto par Bayer pour… 59 milliards d’euros !) et chapeautée par une « gouvernance » sans légitimité politique, qui veut déposséder le Politique de ses moyens face à l’Economique.
Beaucoup de nos compatriotes oublient cela (ou ne le savent pas ?) et sont persuadés que la situation affreuse des classes ouvrières au XIXe siècle en Europe et en Amérique du Nord n’était qu’un « moment nécessaire » ou un « malheur temporaire » qui a permis de « développer le monde » et d’accéder à la société de consommation. Peu réfléchissent aux conséquences sociales de cette société de consommation qui joue de la séduction, par la publicité et le crédit, pour se légitimer et perdurer : ainsi, elle est la forme la plus habile et la plus agréable, confortable pourrait-on dire, d’une « servitude volontaire » qui en appelle aux appétits plutôt qu’à l’esprit ou à l’intelligence… et dont les conséquences peuvent être les délocalisations industrielles, l’exploitation la plus infâme des ouvriers des pays du Sud et le chantage à l’emploi à l’égard de ceux du Nord, dont les salariés français.
Or, dans les démocraties contemporaines, le Pouvoir politique appartient aux séducteurs, aux charmeurs (à défaut de prince charmant…), à ceux qui sauront « se vendre » pour mieux conquérir ce Pouvoir (ou son apparence brillante) qu’ils n’auront de cesse, ensuite, de vouloir conserver à leur service, alors qu’il faudrait que cela soit l’inverse, c’est-à-dire qu’ils servent plutôt que de « se » servir.


Le royaliste en colère Georges Bernanos résumait en son temps cette situation par une formule vengeresse expliquant que la « Démocratie » n’était que la forme politique, institutionnelle, du capitalisme : se trompait-il, au regard de l’actualité présente ? Pas vraiment, malheureusement.
Le cas d’Alstom est, aujourd’hui, fort intéressant à étudier, au-delà même du nécessaire combat pour la sauvegarde de l’outil industriel à Belfort et des 400 emplois qui restent (quand il y en avait plus de 1.000 il y a encore une dizaine d’années).

Alstom est un de nos anciens fleurons industriels, en partie bradé à l’entreprise états-unienne « General Electric » en 2014, et aujourd’hui soumis, pour sa branche transports, aux oukases de ses clients étrangers et des intérêts de ses actionnaires, dont l’Etat qui ne semble pas, et c’est ce qu’on peut légitimement lui reprocher, prendre son rôle au sérieux jusqu’à ce que la catastrophe arrive !
Disons-le simplement : la République ne sait pas défendre l’intérêt public et celui des producteurs, entreprises comme ouvriers, et Alstom nous en donne, après Florange, après Clairoix, après tant d’autres exemples ces dernières années, une nouvelle preuve, terrible pour l’emploi à Belfort… Car si ces 400 emplois disparaissent, c’est une nouvelle étape dans la désindustrialisation accélérée du pays et dans le processus de mise sous dépendance (sous tutelle, devrait-on dire) de notre économie par les grandes féodalités internationales, au moment même où l’entreprise Alstom engrange de mirifiques contrats à l’étranger et qu’elle construit des usines… à l’étranger !
Le réveil de l’Etat, dans cette affaire, est bien tardif, sans doute insuffisant, et peu convaincant en cette période de campagne présidentielle qui se prête à de nombreuses promesses et à de grandes mascarades…
Mais le fait que la direction d’Alstom soit si peu disposée à obéir à l’Etat est aussi la marque de l’impuissance de la République à se faire respecter en tant qu’Etat quand, pourtant, il s’agit de secteurs stratégiques sur le plan économique et industriel : quel spectacle ! Quel triste spectacle ! Quelle absence, aussi, d’autorité et de vision à long terme !
Et, pour couronner le tout (si je puis dire), le gouvernement français est menacé par la Commission européenne de Bruxelles d’être poursuivi pour certaines de ses mesures de sauvegarde de l’emploi à Belfort (mesures annoncées par le secrétaire d’Etat aux transports, M. Vidalies), et cela au nom de la sacro-sainte « libre-concurrence non faussée », plus favorable, en définitive, aux actionnaires qu’aux travailleurs.

Quelques questions se posent alors, sans doute avec quelque colère : où est l’Etat ? Où est sa puissance, où est son autorité ?
La République semble ne plus être désormais qu’une sorte de « gouvernorat » au sein d’une Union Européenne qui n’écoute même plus les représentants de la France, comme on peut aussi le constater dans l’affaire du Traité transatlantique : quelques jours après que le secrétaire d’Etat français Matthias Fekl chargé du commerce extérieur ait annoncé que la France souhaitait l’arrêt des négociations entre l’UE et les Etats-Unis, M. Juncker, dans son discours à l’Union du 14 septembre, affirmait que ces mêmes négociations se poursuivraient et seraient menées à leur terme ! Mais, quand M. Juncker se moque ainsi ouvertement de la France, c’est aussi parce que la République, elle, se moque de nous, par son inconstance et son impéritie : ne s’est-elle pas, depuis longtemps, abandonnée aux griffes d’une « Europe » forcément atlantiste et libérale ?
Et pourtant ! Est-ce une fatalité ? Est-ce le sens obligatoire de l’histoire ? Ne peut-on rien faire ?

 

2nde partie : Propositions et conclusion monarchique.

Pourtant, et malgré tout, des solutions existent ! Et les pressions de l’Etat sur la SNCF (dont il est l’unique actionnaire, à ma connaissance) ne sont pas vraiment infondées : après tout, la SNCF vit aussi des subventions de l’Etat et de l’argent des contribuables (et cela depuis 1937), et cela lui donne quelques devoirs, me semble-t-il !
Ainsi, le développement du ferroutage, nécessaire pour diminuer le poids de la route dans l’économie des transports et des échanges, mais aussi les rejets de gaz à effet de serre et la pollution atmosphérique dont on connaît les effets dévastateurs sur la santé des Français, apparaît-il hautement souhaitable et permettrait de donner quelques années de travail supplémentaires aux salariés de Belfort.
Quant à l’usine Alstom de Belfort elle-même, sans doute n’est-il pas impossible d’engager une certaine mutation de l’outil industriel, par exemple vers la construction de nouveaux équipements, comme l’a suggérée le maire de la ville de Lourdes, Mme Bourdeu, qui souhaite la fabrication de trains médicalisés pour acheminer les malades vers sa ville, lieu de pèlerinage catholique mondialement connu mais plutôt mal desservi depuis quelques années par une SNCF peu motivée par cette activité de transport pour personnes handicapées.
De plus, l’on pourrait imaginer que l’usine de Belfort s’oriente aussi vers une logique de « récupération et réparation » des matériels déjà existants mais nécessitant des aménagements pour répondre à d’autres options ou à d’autres clients que leurs propriétaires initiaux.

Ce ne sont que quelques propositions, mais elles existent et elles ne sont pas, là encore, exhaustives : encore faut-il bien vouloir y réfléchir, et c’est aussi le rôle de l’Etat de soutenir ces réflexions et les efforts d’imagination qui peuvent permettre de sortir de la seule logique comptable…
Mais, avant tout, il nous faudrait un Etat digne de ce nom, un Etat véritablement stratège, un Etat qui décide et dirige, non pour faire peser un insupportable étatisme sur les entreprises, mais pour en orienter intelligemment l’activité et impulser (et soutenir, évidemment) de nouveaux projets, dans le cadre d’un nécessaire redéploiement industriel et de l’aménagement équilibré du territoire (ou, plus exactement, des territoires).
Il y a tant à faire ! Ce ne sont pas les idées, les projets, les volontés qui manquent en France, pays où la matière grise est un gisement parfois sous-exploité : c’est surtout la volonté politique et l’Etat qui manquent à l’appel et à ses missions, et les royalistes ne cessent de le clamer depuis des décennies, en particulier depuis la fin de la République gaullienne !
Disons-le haut et fort : si vous avez résolu d’être « patriote économique », vous devez, et la raison et l’expérience le commandent, conclure à la Monarchie « à la française », monarchie éminemment politique, stratège et sociale.

L’histoire nous le rappelle : il n’y a pas de Colbert en France qui vaille et qui tienne s’il n’y a pas le Roi qui lui permet d’être et de durer, en toute indépendance et en pleine efficacité !
En attendant le roi des temps présents, les royalistes ne doivent pas oublier d’assurer cette sorte de « régence politique et sociale » nécessaire, et il est de notre devoir de poursuivre notre travail de proposition et de soutien, pour les ouvriers d’Alstom comme pour tous ceux qui, aujourd’hui, sont abandonnés par une République qui ne pense qu’à se perpétuer quand c’est le pays tout entier qu’il faudrait, encore et toujours, encore et d’abord, conforter et réconforter…

Jean-Philippe Chauvin